« Les populistes sont la honte de l’Europe ! »
C’est ce qu’on entend chez les progressistes et les européistes en général et en particulier à Bruxelles.
La présidente de la Commission européenne, qui n’a rien trouvé de mieux pour aider l’Europe que de montrer comment se laver les mains, est partie en guerre contre Viktor Orban le président de la Hongrie.
Ce que ne font absolument pas remarquer les médias principaux, c’est que les gouvernement populistes d’Europe regroupés dans le groupe de Visegrâd (Pologne, République tchèque, Slovaquie) s’en tirent bien mieux, dans la crise du coronavirus, que les autres pays.
Regardez bien ce graphique que j’ai tracé à partir des données du site worldometers.info.
L’axe des abscisses est gradué en nombre de cas de coronavirus par millions d’habitants tandis qu’en ordonnée, on a le nombre de morts par millions d’habitants.
Ainsi, les points situés en bas à gauche correspondent aux minimums de contaminés et de morts tandis que les points en haut à droite indiquent les maximums en contaminés et de morts.
Et que constate t-on ?
Les meilleurs résultats sont affichés par la Pologne (186 cas et 7 morts par million) et le pire par l’Espagne (3 690 cas et 386 morts).
Mais le plus remarquable, c’est que les pays du groupe de Visegrâd (regroupés sous l’ellipse verte) ont de bien meilleurs résultats que les autres pays d’Europe (sous l’ellipse orange), mais à part l’Allemagne qui présente des résultats intermédiaires.
Ce graphique illustre parfaitement un article du dernier numéro de Valeurs actuelles intégré dans un dossier intitulé : Et le virus acheva l’Europe.
Extraits :
Europe, le moment populiste
Rétablissement des frontières, primat de la souveraineté nationale sur la souveraineté européenne, contrôle de l’immigration, ces orientations remisées naguère au grenier des « passions tristes » s’imposent aujourd’hui comme autant d’évidences.
La campagne actuelle des institutions communautaires contre Viktor Orban ne doit rien au hasard. Sa gestion drastique et précoce de la pandémie de Covid-19 a agi comme le miroir des impuissances européennes. À l’heure où nous écrivons ces lignes, la Hongrie enregistre 733 cas confirmés et 34 décès liés au coronavirus. Pour l’eurodéputé Rassemblement national Jean-Paul Garraud, ce bilan relativement faible s’explique par les mesures fortes adoptées par le maître de Budapest :
En fermant très tôt ses frontières, en anticipant les moyens de protection de sa population, en refusant l’immigration incontrôlée et en actionnant tous les leviers nationaux, Viktor Orban a démontré l’efficacité de sa politique et mis au jour l’inutilité du programme européiste et mondialiste.
À un moment où l’Union européenne vacille sur ses fondations, cette tectonique des plaques politiques nourrit son inquiétude. Dans ce contexte, les mises en garde solennelles contre la tentation populiste sonnent comme un essai désespéré de donner le change.
Plutôt que d’interroger ses propres insuffisances, le camp européiste a préféré fustiger les méthodes « inquiétantes » du Premier ministre hongrois. En cause, le vote d’une loi le 30 mars autorisant le dirigeant magyar à légiférer par ordonnances dans le cadre d’un état d’urgence à durée indéterminée. Dans son rôle, l’opposition locale a rué dans les brancards: « putsch constitutionnel »,« loi du dictateur », « coup d ‘État », « pleins pouvoirs », a-t-on pu lire et entendre sur les rives du Danube. L’Union européenne, qui navigue en pleines turbulences, se joint aussitôt au concert des récriminations.
Une recomposition politique à la faveur des populistes
Pour Jean-Paul Garraud, le dénigrement permanent de la politique du maître de Budapest est l’aveu paradoxal de son efficacité. Il rappelle ainsi que les Hongrois ont largement reconduit la majorité sortante Fidesz-MPSZ (parti de Viktor Orban) lors des élections législatives de 2018: « Cette victoire électorale au suffrage universel direct permet des modifications constitutionnelles, comme cela a été plusieurs fois le cas en France. Alors que redoutent nos bien-pensants ? »
Ils sont effrayés à l’idée que l’affreuse politique de « repli nationaliste » ne réussisse. »
C’est que le Premier ministre hongrois est la figure de proue d’une tendance lourde en Europe. Son inflexibilité et la légitimité dont il jouit sur ses terres produisent un effet d’émulation sur le vieux continent. Malgré une absence de vision commune quant à leur futur européen, les autres pays du groupe de Visegrâd (Pologne, République tchèque, Slovaquie) s’alignent sur les valeurs nationales conservatrices du Premier ministre hongrois. Or aujourd’hui, la crise du coronavirus joue comme un accélérateur d’une recomposition politique européenne en gestation depuis plusieurs années. En septembre 2016, lors du Forum économique de Krynica, Orban et le président du parti polonais Droit et Justice (PiS), Jaroslaw Kaczynski, appelaient déjà de leurs voeux une « contre-révolution culturelle » en Europe. Quatre ans plus tard, là voilà en marche, pour reprendre le lexique du « nouveau monde« . Pour l’heure moins affecté que les pays d’Europe occidentale, le groupe de Visegrâd sort de l’ornière pendant que l’Union européenne s’y embourbe. De quoi aiguiser l’appétit politique des formations populistes à l’Ouest. Fin février, lors d’un meeting de campagne des élections municipales à Lens, Marine Le Pen expliquait déjà que la crise du coronavirus venait « valider [sa] vision du localisme » et « la nécessité pesante de relocaliser, l’urgence de revoir notre adhésion aveugle à cette mondialisation sans limite et sans règle ».
Côté transalpin, Matteo Salvini pourrait également sortir gagnant de cette séquence. En adoptant des mesures de confinement strictes, un peu tardivement certes, l’Italie a fait office de pionnière dans la lutte contre la pandémie de coronavirus. D’abord réticents, ses voisins lui ont prestement emboîté le pas. Ce pays qui a longtemps payé l’absence de solidarité de l’Europe en matière de gestion des flux migratoires retrouve aujourd’hui un regain de fierté. Là encore, « il Capitano » peut s’enorgueillir d’avoir anticipé depuis de nombreuses années les faiblesses inhérentes à l’espace Schengen.
Si ce sursaut populiste est moins palpable dans des pays comme l’Allemagne et les Pays-Bas, la mauvaise gestion de la crise par l’Union européenne pourrait in fine jouer en faveur des formations anti-système. Car, si attachés soient-ils à l’idée européenne, les pays membres ont très majoritairement sacrifié aux préconisations populistes et non aux postulats bruxellois: exit Maastricht et sa discipline budgétaire, exit Schengen et sa liberté de circulation. Place au retour des nations.
Qu’elles soient ou non aux fonctions, ces forces populistes ont désormais un boulevard devant elles pour imposer leurs fondamentaux. Emmanuel Macron et la chancelière allemande Angela Merkel ne s’y trompent pas lorsqu’ils convoquent, non sans insistance, le concept de « souveraineté nationale ». Chacun d’eux observe les mécanismes à l’oeuvre et tente d’atteindre un nouvel équilibre. Une prise de conscience un peu tardive que ne manqueront pas de fustiger leurs adversaires.
Il est loin le temps des dithyrambes en faveur de l’Union européenne. « Naissance d’un langage commun », « une touche d’humanisme et de lumière », « moins d’impuissance, plus de stabilité », telles étaient les promesses exaltées lancées au lendemain de la signature du traité de Maastricht en 1992. Mais déjà, à l’époque, quelques voix dissonantes vinrent troubler l’harmonie incantatoire. Ces rabat-joie de la première heure redoutaient une atteinte à la souveraineté des États. Peine perdue, leurs inquiétudes furent étouffées sous l’opprobre. On avait oublié leur descendance.
Victor-Isaac Anne pour Valeurs actuelles.
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