Les Etats-Unis sont une puissance impériale jadis prompte à intervenir militairement dans les coins du monde les plus éloignés.
Son complexe militaro-industriel est hyper-puissant et pèse sur la politique étrangère des Etats-Unis.
Dans le passé, les grandes entreprises américaines bénéficiaient globalement des activités militaires de leur pays (vente d’armes, reconstruction, etc …) et donc soutenaient l’exécutif américain. Mais il semble que la guerre en Ukraine ait un peu changé la donne et que certaines grandes entreprises critiquent les positions agressives de la Maison Blanche.
C’est ce que nous explique cet article de La Sélection du Jour signé Ludovic Lavaucelle :
L’OTAN se heurte à la résistance
inattendue des grandes multinationales
L’interventionnisme armé a été souvent interprété – avec une certaine justesse – comme le garant du succès des grandes entreprises américaines. L’option militaire a permis d’enfoncer les portes de nouveaux marchés ou de protéger jalousement l’accès à des ressources essentielles comme le pétrole. Le journaliste du New York Times, Thomas Friedman, l’a dit de manière explicite en 1999, à l’époque du libéralisme triomphant : la « main invisible » du marché ne pourra jamais opérer sans une poigne de fer : McDonalds ne peut pas prospérer sans les chasseurs F-15 de McDonnell Douglas. Alors que l’aigle américain livre une guerre de procuration en Ukraine face à la Russie, et qu’il entend isoler la Chine, une nouvelle ligne de résistance se forme. Si la révolte de grands patrons européens, acculés par l’inflation des coûts due aux sanctions contre la Russie, se fait entendre, il est remarquable de constater l’opposition qui monte de grandes multinationales américaines, souligne Thomas Fazi pour Unherd (voir l’article en lien)…
Les chefs d’États européens jouent jusqu’à présent parfaitement leurs rôles de vassaux soumis à Washington. Si Emmanuel Macron et quelques autres émettent de temps en temps des grognements discrets, l’Union Européenne fait office d’antichambre de la diplomatie américaine sous le patronage d’Ursula von der Leyen. À tel point que le magazine Politico l’a appelée « la Présidente américaine de l’Europe » … Du point de vue diplomatique, l’U.E. appuie sans réserve les menées des États-Unis contre la Russie et pour défaire les liens économiques avec la Chine. Même si cette stratégie va à l’encontre des intérêts économiques européens. Bruxelles cherche par ailleurs à imposer aux entreprises européennes une charte contraignante censée réguler strictement les chaînes d’approvisionnement, sur le modèle en vogue aux États-Unis : une nouvelle table des commandements autour des « droits sociaux ». Ce nouveau « machin » bureaucratique risque d’alourdir encore la gestion des entreprises européennes…
Chercher à moins dépendre du régime totalitaire chinois paraît cohérent, après ce que la crise du Covid a révélé. Mais l’Europe a-t-elle les moyens de couper ses liens commerciaux avec la Chine ? Les patrons allemands sont convaincus que non : les échanges pesaient presque 300 milliards d’euros en 2022, faisant de la Chine le premier partenaire commercial de l’Allemagne. Déjà très affectée par l’interruption des importations de gaz russe, et une inflation de 7,2% dans une économie en récession, l’Allemagne ne peut pas se permettre de fermer la porte à la Chine. Et ce qui est vrai pour l’Allemagne, l’est pour le reste de l’U.E. Le patron de Mercedes Benz, Ola Köllenius, a sonné la révolte en avril dernier en disant publiquement qu’« abandonner la Chine » était impensable pour l’industrie allemande. Dans le monde policé des grandes entreprises teutonnes, cette déclaration a été immédiatement soutenue par Siemens, BASF, BMW et Volkswagen…
On constate une faille grandissante entre la soumission des membres de l’OTAN aux intérêts géostratégiques américains et les intérêts économiques des grandes entreprises occidentales. C’est un renversement ! Si – comme le disait Friedman en 1999 – le complexe militaro-industriel U.S. a servi de protecteur aux multinationales américaines pendant des décennies, la globalisation des échanges a bouleversé cette donne. Plusieurs grands patrons américains affichent ouvertement leur opposition à la diplomatie agressive de Washington. Depuis mars dernier, les PDG de JP Morgan, de Starbucks, d’Apple et General Motors se sont rendus en Chine pour rassurer leurs partenaires locaux sur leur volonté de continuer de travailler avec eux. La visite qui a fait le plus de bruit est celle d’Elon Musk fin mai. Il a obtenu plus de réunions avec des officiels chinois de premier plan (comme Qin Gang, le ministre des Affaires Étrangères) que la plupart des représentants du gouvernement américain ces derniers mois. Défiant Washington, Musk a déclaré qu’il comptait développer ses investissements en Chine et a souhaité que les deux rivaux retrouvent un esprit de coopération. La Chine reste le premier marché mondial de biens de consommation et le premier exportateur de métaux rares. Il n’est pas étonnant que les multinationales s’inquiètent des conséquences désastreuses d’un éventuel conflit entre les deux géants.
McDonalds a pu s’installer dans l’ex URSS en profitant de l’effondrement du monde communiste. Mais cette firme symbolique du libéralisme triomphant a été forcée de quitter le sol russe en 2022, perdant au moins 1 milliard de dollars de chiffre d’affaires. Le monstre militaro-industriel a grandi pendant la Guerre Froide ; il semble aujourd’hui avoir brisé ses chaînes au service d’un nouveau libéralisme social qui va à l’encontre des intérêts capitalistes. On pourrait voir là une nouvelle lutte des classes : les propriétaires des moyens de production contre les propriétaires des moyens de destruction…
Ludovic Lavaucelle pour La Sélection du Jour.
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Une réponse à “Les multinationales lâcheraient-elle Biden en Ukraine ?”
Biden n’est qu’un pantin, et vu son état de santé, c’est de plus en plus évident …