Barbara Lefebvre, la combattante

Publié par le 21 Fév, 2018 dans Blog | 0 commentaire

Barbara Lefebvre, la combattante

Décidément, les femmes sont à l’honneur dans ce blog!

Après Lydia Guirous, Anne-Laure Debaecker, Leïla Adjaoud, Florence Rault, Jeannette Bougrab, je relaye aujourd’hui un article de Valeurs actuelles consacré à Barbara Lefebvre.

Professeur d’histoire-géographie, Barbara Lefebvre publie un ouvrage lucide et féroce sur la jeunesse, l’école, la société. Portrait d’une hussarde de la République qui refuse de croire que la défaite est inéluctable.

Les Français l’ont découverte le 6 avril 2017, opposée à Macron sur le plateau de l’Émission politique. Professeur d’histoire-géographie, Barbara Lefebvre avait mis en difficulté le futur président de la République: « Je l’ai interrogé sur ses propos, tenus en novembre 2016 en Algérie, qui assimilaient la colonisation  à un crime contre l’humanité, raconte-t-elle. Je lui ai demandé en substance si, désormais, j’allais devoir enseigner à mes élèves que Jules Ferry ou Lyautey étaient des criminels de guerre. Puis, je lui ai parlé de l’usage qu’il faisait du terme « refoulé colonial » et s’il pensait que c’était en aggravant cette fracture identitaire qu’il espérait que tous les jeunes des « territoires perdus » se sentiraient français et aimeraient leur pays … »

La charge n’avait pas plu à tout le monde et Barbara Lefebvre, qui avait eu le malheur de participer peu de temps auparavant à trois tables rondes organisées par les équipes « Société civile » de François Fillon, s’était retrouvée engluée dans une de ces polémiques dont les médias raffolent. La professeur, qui s’était contentée d’évoquer les questions du handicap à l’école, et qui avait d’ailleurs proposé la même intervention aux équipes du candidat En marche !, sans réponse, s’est vue accusée de dissimulation et de mensonge. « L’accuser d’être une menteuse, c’est grotesque, s’indigne une collègue. Si elle avait bossé pour Fillon, elle l’aurait dit. Ceux qui ont mené cette cabale sont ceux qu’elle renvoie à leur manque d’intégrité. »

Là où ses contempteurs n’avaient pas entièrement tort, c’est que Barbara Lefebvre n’était en effet pas « une Française parmi d’autres ». Ces gens-là, du reste, si souvent invoqués par les médias, leur sont en réalité le plus souvent inconnus: les relations des journalistes se bornent aux milieux associatifs, aux réseaux militants, aux auteurs d’ouvrages ou de tribunes. Barbara Lefebvre n’était nullement un soutien de Fillon, un membre actif de Sens commun, une catholique traditionaliste (elle est juive !), mais en revanche elle avait participé, avec d’autres, à la rédaction d’un livre édifiant, tragique, et dont la lecture a quelque chose d’accablant : les Territoires perdus de la République, une expression désormais passée dans le langage courant.

Dans son collège, le 11 septembre a été salué par des cris de joie

C’était à l’automne 2002. Barbara Lefebvre enseigne alors dans un collège de Colombes, dans les Hauts-de-Seine. C’est là qu’elle a vécu, un an plus tôt, les attentats du 11 Septembre. Cet événement, qui a choqué le monde, ne la surprend pas tant que ça. « Je n’étais pas vraiment étonnée, explique-t-elle. J’ai trouvé ça terrifiant par son ampleur, évidemment, mais l’irruption du terrorisme islamique me semblait inévitable. » Quelques années plus tôt, effectuant un séjour d’étude à l’Université hébraïque de Jérusalem, elle avait connu les attentats, le climat de guerre civile. Le 21 août 1995, le bus qui précédait le sien avait été soufflé par l’explosion d’une bombe et plusieurs étudiants qu’elle connaissait y avaient perdu la vie.

Ce qu’elle retient du 11 Septembre, ce sont les cris de joie dans son collège, dans la cité. « Ce qu’on pouvait entendre, déjà à l’époque, dans la bouche de ces gamins, ce qu’on pouvait lire dans les copies de ceux qui, jeunes encore, fréquentaient la mosquée, c’était délirant  », se souvient-elle. Et c’est parce qu’elle n’a pas eu peur de parler de ce « délire », de raconter ce qu’elle voyait et entendait, au jour le jour, dans ses classes et dans les couloirs, qu’elle a rejoint l’équipe qui se constituait alors autour de Georges Bensoussan et qui allait donner naissance aux Territoires perdus de la République. L’objectif était simple: montrer à tous ce qui, déjà, crevait les yeux de certains, encore trop seuls, trop inaudibles, politiquement incorrects.

Le livre est paru. Un silence poli entoura sa publication, brisé par quelques cris de désapprobation. Un rapport parlementaire, dirigé par Jean-Pierre Obin, fut diligenté. Sur la question de la visibilité de l’islam dans les établissements scolaires, il confirma en tout point le tableau accablant de la situation, de ces morceaux de France qui se détachaient lentement du corps commun et annonçaient de violentes déchirures dans le tissu social. Le rapport fut pudiquement enterré. « Et il a fallu attendre Charlie Hebdo, l’Hyper Cacher et le Bataclan pour que certains Français ouvrent les yeux » commente Barbara Lefebvre. Pour elle, les Territoires perdus de la République marqueront un tournant. Insultée, menacée de mort, elle choisira bientôt de changer d’air pour quelque temps et de délaisser le terrain.

Un crève-coeur pour cette militante de l’instruction publique. « J’ai toujours voulu être prof, du moins après avoir compris que j’étais trop mauvaise en maths pour être médecin, sourit-elle. Un prof à l’ancienne, de français ou d’histoire, qui transmet du savoir, qui est volontaire pour les Zep, la France périphérique … » La traduction dans les faits d’un ressenti profond, d’une conscience: « Je suis très péguyste, je crois à l’amour charnel de la patrie. Mon grand-oncle, engagé volontaire dans la France Libre, emmenait chaque année mes cousins assister au défilé du 14 Juillet. Ma grand-mère, née en Tunisie, pleurait en écoutant la Marseillaise. Qui empêche un directeur d’école de faire chanter l’hymne national aux élèves rassemblés dans la cour ? » Pour l’instant, la jeune femme, mère d’une petite fille, se contente d’exiger de ses élèves qu’ils se tiennent en rang, ce qui lui vaut déjà de passer pour une professeur « rigide », une « réacpublicaine » comme la surnomment ses contradicteurs – qu’elle qualifie pour sa part de « pédagauchistes » …

« C’est une femme entière, qui pouvait paraître un peu raide dans l’affirmation de ses convictions, se souvient Georges Bensoussan. En la retrouvant pour Une France soumise, j’ai constaté qu’elle était plus souple, moins tranchante qu’avant. Elle avait ajouté à sa grande capacité de travail un véritable esprit de synthèse. Elle a aussi beaucoup de courage dont celui, assez rare, de dire à un interlocuteur hostile ce qu’elle pense et croit, sans provoquer ni se démonter non plus. Enfin, bien qu’ayant connu désillusions, avanie, trahisons, elle est restée une combattante. Je crois que s’il fallait garder un mot pour la caractériser, ce serait celui-là. »

Mickaël Fonton pour Valeurs actuelles.

Génération « j’ai le droit » : la faillite de notre éducation.

Toute une génération ne cesse de répéter  » J’ai le droit « , exprimant de manière péremptoire un  » droit de s’élever contre  » : l’école, l’autorité parentale, les règles communes et même la loi en général. Plus que jamais cette revendication symbolise un individualisme irresponsable et témoigne d’une faillite collective accablante : régression de nos libertés collectives au profit des communautés, triomphe de l’égalitarisme, dérives pédagogiques de l’Education nationale, démission de parents dépassés… Barbara Lefebvre montre, preuves à l’appui, comment nos enfants ont été abandonnés culturellement par notre système éducatif. Elle alerte sur des enjeux qui dépassent largement la sphère scolaire : nivellement par le bas, absence des familles, mépris des valeurs humanistes fondamentales, racisme, sexisme, antisémitisme, destruction de la laïcité, culte de l’individualisme …

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