Je salue avec enthousiasme le retour de Dominique Jamet dans le vaisseau amiral de la presse de ré-information, Boulevard Voltaire.
Accompagnés des époux Ménard, Robert et Emmanuelle, Dominique Jamet avait été l’un des fondateur de Boulevard Voltaire en 2012. Il est un analyste avisé de la politique et manie avec élégance une langue française qu’il vénère.
Il inaugure son retour avec cette première chronique :
Strictement personnel : Le mot juste
« Mal nommer les choses, c’est ajouter aux malheurs du monde »… « Il faut toujours dire ce que l’on voit. Surtout, il faut toujours, ce qui est plus difficile, voir ce que l’on voit ». Si connues et même si galvaudées que soient ces deux citations, respectivement d’Albert Camus et de Charles Péguy, pourquoi placer sous leur invocation cette première chronique ? C’est qu’elles ont la force tranquille de l’évidence, la lumière éclatante de la vérité. C’est qu’elles sont une lueur et un guide dans notre nuit.
Parlons vrai. Nous avons sacrifié notre autonomie, notre indépendance, notre souveraineté nationale, politique, économique sur les autels de l’atlantisme, du mondialisme, du fédéralisme, du libéralisme. Des décennies de mauvais gouvernement ont achevé la besogne.
Quand, pour la cinquantième fois consécutive depuis 1974, notre gouvernement présente un budget en déficit, que notre passif s’élève à 116 % de notre produit intérieur brut annuel, que le service de la dette est en passe de devenir notre premier poste de dépense, que notre pays, il y a cinquante ans quatrième puissance mondiale, a rétrogradé au septième rang et que la glissade se poursuit, –
Quand nous avons délocalisé, bradé, liquidé notre industrie, que nous importons plus que nous n’exportons, que nous achetons plus que nous ne vendons, que nous sommes tombés dans la dépendance de l’extérieur, –
Quand nous avons laissé péricliter, dépérir, s’abîmer notre agriculture, naguère notre fierté et notre richesse – pauvres mamelles de la France, aujourd’hui desséchées et que la rébellion de nos derniers paysans ne les garantit pas d’une extinction prochaine, –
Quand notre système scolaire et universitaire, longtemps admiré, envié et imité dans le monde entier ne cesse de rétrograder dans les classements internationaux, –
Quand notre système hospitalier, récemment encore cité en exemple, fait eau de toutes parts, que les lits sont fermés, les médecins débordés, les infirmiers et les soignants épuisés, que les services d’urgence, submergés, deviennent des parkings de brancards, –
Quand notre armée, exsangue, doit quitter piteusement, la queue entre les jambes, les États mêmes qui l’avaient appelée au secours, quand elle ne peut aider l’Ukraine qu’en lui livrant des matériels de longue date bons pour la réforme ou des canons modernes qu’en vidant ses arsenaux, –
Quand la voix de la France, au mieux, n’est plus entendue dans le monde et que son discours, incohérent, au pire, en est la risée, –
Quand les chiffres officiels estiment à quatre millions le nombre des mal logés, à près de quatre cent mille celui des sans-logis, et que celui des constructions nouvelles ne cesse de baisser, –
Quand l’État, impuissant, est aussi incapable de contrôler nos frontières, d’empêcher les entrées illégales sur notre sol, que d’expulser les indésirables de notre territoire, –
Quand le même État, officiellement mobilisé et pratiquement démissionnaire, a délégué à la pègre, avec la complicité passive de millions de consommateurs et la participation active de centaines de milliers de salariés qui constituent une véritable armée, réelle, du crime et, virtuelle, de la subversion, la production et la commercialisation des divers types de drogues, –
Quand les apôtres de la décroissance et les fanatiques de l’écologie punitive, dans une incroyable offense au sens des mots et au bon sens, osent qualifier de « déclinistes » ceux qui décèlent, décrivent, déplorent et dénoncent la déchéance et les multiples démissions de la France et de ses dirigeants, donc le déclin, –
Quelle expression serait la plus appropriée pour dire la réalité et définir l’état présent de notre cher et vieux pays ? Le « Grand Remplacement » ? Il n’en est que l’un des aspects, certes parmi les plus graves. Le « Grand Déclassement » ? La formule n’a rien d’exagéré. Mais Michel Onfray, cette semaine, parlait d’effondrement de la France et l’appellation me paraît finalement la plus adaptée aux temps lamentables que nous traversons. Donc le mot juste.
Il faudrait – il faudra ? – beaucoup de courage, beaucoup d’efforts et beaucoup de persévérance aux Français et aux gouvernants qu’ils finiront bien par se donner un jour pour procéder au redressement nécessaire et repartir à la recherche du rang perdu.
Dominique Jamet pour Boulevard Voltaire.
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