« Humanité et fermeté » : la grande illusion !

On peut être certain que la future loi d’Emmanuel Macron sur l’immigration ne résoudra absolument rien des problèmes de la France dans ce domaine.

C’est contraint et forcé par la droitisation de la société française et de sa majorité présidentielle relative, que Macron a dû se résoudre à lancer un nouveau projet de loi sur l’immigration.

Dès le début, cette loi est née sous le signe du « en même temps » qui, par définition, la privera de toute efficacité pour réduire l’immigration.

Avoir jeté un ministre de gauche : Olivier Dussopt, dans les pattes de Gérald Darmanin qui a depuis longtemps renié ses ex-opinions de droite,  fut le premier signe que cette loi s’inscrirait dans la grand illusion illustrée par l’oxymore suivant :

Fermeté et humanité

Deux notions antinomiques dont on sait par avance que l’Humanité en sortira vainqueur !

Enfin, « Humanité », il faut le dire vite quand on observe les conditions de vie épouvantables dans les camps de migrants sous le périphérique parisien …

« Fermeté et humanité » : il s’agit juste d’un slogan attrape-gogos servi dans chaque loi sur l’immigration depuis 40 ans, avec le succès que l’on sait … gauche et droite confondues !

Et quand le président de la République lui-même, quelques jours avant la discussion préliminaire de cette loi au Parlement déclare dans les colonnes du Parisien :

« La France a toujours été une terre d’immigration.
Cela fait partie de notre ADN. C’est la force de notre pays »

on comprend qu’après le vote de la loi, on aura plus d’immigration qu’avant !

Dans le magazine l’Opinion, l’édito de Nicolas Beytout enfonce le même clou que moi :

Immigration: l’embarrassant « et-et » de Macron

Il y a fort peu de chances pour que les centaines de migrants qui ont installé leurs tentes en plein cœur de Paris, entre le Louvre et le Conseil d’Etat, aient lu dans Le Parisien les dernières déclarations d’Emmanuel Macron sur l’immigration. Mais l’auraient-ils fait qu’ils auraient pu y trouver la confirmation que leur stratégie d’occupation des lieux était sans risque. « Il faut de la fermeté et de l’humanité » pour traiter ces sujets, déclare en effet le président de la République. Sauf que la dernière fois qu’un tel campement sauvage avait été délogé, l’affaire avait tourné court et le gouvernement avait sombré sous les accusations d’inhumanité.

Nicolas Beytout

Cela fait des décennies que les gouvernements se servent du théorème de l’ancien Premier ministre Michel Rocard (la France ne peut pas « héberger toute la misère du monde », mais elle doit rester « une terre d’asile politique »), formule dont on sait qu’elle n’a jamais débouché sur de la fermeté. Face à un bateau sans attache, à des mineurs isolés, à des victimes de passeurs, à des professionnels de l’asile, la morale prend systématiquement le pas sur le droit.

Aucun doute, pourtant : sur ce sujet, Emmanuel Macron a évolué. Il a senti le durcissement progressif de l’opinion publique française, il a mesuré la droitisation de sa majorité et plus largement celle de l’ensemble de la représentation politique. Mais on le voit encore gêné, comme embarrassé par son « et-et », et de gauche et de droite, et humanité et fermeté. En témoignent les acrobaties permanentes qu’il doit effectuer pour concilier ces deux contraires : un projet de loi porté par un ministre de droite et un de gauche, un débat parlementaire mais sans vote avant de revenir plus tard avec un texte de loi, un projet qui ne sort pas du flou. Voilà pourquoi, face à l’immigration, le sentiment d’impuissance gagne dans la population.

Nicolas Beytout pour l’Opinion.