Pendant un an, la journaliste Nora Bussigny a infiltré les milieux wokes sous une fausse identité. Manifestations, actions ou groupes de paroles …
Dans son livre enquête Les Nouveaux inquisiteurs (Albin Michel), elle retrace son expérience et dévoile l’envers du décor.
C’était l’introduction d’une interview de Nora Bussigny parue dans Le Club de Valeurs actuelles :
LGBT, féministes… : « Je tenais à dénoncer cet aspect inquisiteur très présent dans les mouvements wokes »
Valeurs actuelles. Comment avez-vous eu l’idée d’infiltrer les milieux wokes ?
Nora Bussigny.
En fréquentant des militants LGBT, j’ai constaté rapidement que la plupart n’en pouvaient plus de côtoyer des extrémistes qui, au nom d’un combat pour les minorités, interdisaient untel parce qu’il était gay, blanc ou cisgenre. J’ai senti qu’il fallait dénoncer ces contradictions. J’ai lu beaucoup d’essais, notamment la très bonne étude réalisée par Pierre Valentin pour la Fondapol. Mais à chaque fois je me disais qu’il manquait une vision plus réelle et concrète, une alternative aux analyses purement théoriques. Je suis journaliste d’investigation, alors, quoi de mieux que de vivre le wokisme pour le comprendre. Je me suis donc ‘’déguisée’’ avec un piercing et même quelques fois avec une perruque rose afin d’intégrer plus facilement les milieux militants.
Vous qui avez observé ces mouvements wokes de l’intérieur, pourriez-vous donner votre définition du wokisme, autre que les définitions théoriques habituelles ?
Le wokisme désigne un mouvement de militants extrémistes et radicaux dans le progressisme. En vérité, je n’aime pas le terme woke, car je le trouve trop galvaudé. Aujourd’hui, on utilise ce terme à tort et à travers. Je connais beaucoup de militants LGBT ou féministes qui ne sont pas du tout wokes. Je trouve d’ailleurs que le terme woke – qui signifie ‘’éveillé’’ – est par principe injuste, parce qu’il sous-entend que moi, par exemple, je ne suis pas éveillée aux discriminations qui m’entourent. Ce terme les place d’emblée dans une position de supériorité.
Pourquoi ce titre, Les nouveaux inquisiteurs ?
C’est un clin d’œil ironique à l’Inquisition.
Pendant l’Inquisition, les autorités tuaient les personnes qui ne pensaient pas comme elles. Aujourd’hui c’est pareil. On menace les gens qui ne pensent pas comme nous, on les harcèle.
Je tenais à dénoncer cet aspect inquisiteur très présent dans les mouvements wokes. Pendant mon immersion, j’y ai été confrontée : lorsque j’ai suivi la formation du service d’ordre de la Pride Radicale, on m’a expliqué clairement que la présomption d’innocence n’existait pas, et que par conséquent, il fallait exfiltrer de la manifestation telle ou telle personne.
Pour moi, c’est exactement ça, la Nouvelle inquisition. On devient des tribunaux populaires.
Pour reprendre une question que vous vous posez à vous-même dans votre livre, est-ce que vous avez écrit cette enquête en tant que journaliste, en tant qu’auteur ou en tant que femme ?
Les trois à la fois. Je ne suis pas allée vers ce sujet-là par hasard. Je suis féministe. Une partie de ma famille vient du Maroc. Techniquement, ces éléments m’ont permis d’intégrer plus facilement le service d’ordre de la Pride Radicale. Je suis hétérosexuelle. Donc forcément, j’arrivais à me positionner. Grâce à ça j’ai pu découvrir le côté communautaire de l’intersectionnalité.
Vous confiez à votre psychanalyste votre peur face à ce qui vous attend après la sortie de votre livre. Depuis la parution de votre enquête, avez-vous été victime de menaces ? Comment ont réagi les militantes que vous avez côtoyées sous votre fausse identité ?
J’ai eu beaucoup de soutien de la part de militants LGBT ou de la part d’universalistes qui racontent leur vécu et confirment mes propos. J’ai eu également beaucoup de soutien du côté de la gauche PS, ainsi que de la part de la droite, c’est certain. Et finalement, le seul lectorat qui continue à me fustiger, c’est celui de la NUPES. Encore hier sur Twitter, le militant Annasse Kazib m’accusait d’avoir passé « un an à mytholand, le royaume du mytho ». La plus drôle des critiques reste quand même celle de la journaliste Marine Baousson, qui consacre sur France Inter toute une chronique à mon enquête, en expliquant qu’elle n’a lu que le chapô d’un article du Point parce qu’elle n’est pas abonnée …
Beaucoup ne comprennent pas parce qu’ils ne veulent pas comprendre.
Les militants que j’ai côtoyés pendant mon investigation ont cherché à me retrouver. Mais ils n’ont pas réussi, car à l’époque j’avais complètement changé mon numéro de téléphone et mon mail pour me protéger. Une chose est sûre, je ne m’attendais pas à vivre le cyber-harcèlement que j’ai vécu depuis la sortie de mon livre. J’ai dû bloquer complètement tous mes réseaux sociaux. Même Le Point a dû réagir pour me protéger. A contrario, beaucoup me défendent aussi, et c’est plutôt positif.
Lors de vos premiers pas sur Discord, vous assistez à une discussion en ligne entre des militantes pro-hijab, qui dédramatisent complètement le hijab. Cet entretien vous choque d’autant plus qu’une femme de votre famille a été voilée de force …
La question du voile me taraude beaucoup dans mes positions universalistes et laïques. A tel point que j’en suis venue à me dire que j’avais peut-être une islamophobie intériorisée parce que je questionnais le port du voile. J’avais l’impression d’être la méchante de l’histoire, celle qui n’était pas d’accord. Lorsque j’ai écouté les Hijabeuses, je me suis rendue compte que leur rhétorique était tournée de façon à nous faire culpabiliser, à nous donner l’impression d’être des monstres parce qu’on interdit à des jeunes filles de faire du football comme elles le veulent. Ce discours très victimaire, c’est le propre du wokisme. On se sent automatiquement coupable. Et je me suis sentie coupable.
Vous écrivez d’ailleurs : « Et si le but central du wokisme c’était ça, faire que nous nous sentions coupables. » Est-ce qu’à un moment donné, vous avez eu peur de perdre le jeu et de tomber dans l’engrenage de la culpabilisation ?
J’ai eu des moments de doute sur moi-même.
J’en suis venue à me demander ce qui faisait de moi une femme.
C’est grâce aux militants universalistes que je n’ai pas perdu pied. La bonne réponse se trouve là, dans l’universalisme.
« Je reste pour ma part très surprise de la différence criante entre les réseaux sociaux où le collectif se veut mordant, strict, laconique, incisif et la réalité à laquelle je suis confrontée ». Comment expliquer cette contradiction ?
On n’est pas à une contradiction près ! Avec les réseaux sociaux, tout prend une autre dimension. La plupart du temps, les militants sont des étudiants, et n’ont pas vraiment le temps et les moyens de s’investir plus que sur les réseaux sociaux …
Comment voyez-vous l’avenir du wokisme ?
Je pense qu’ils vont s’entredévorer. Leurs dérives sont trop extrêmes. Beaucoup en ont marre. A la sortie de mon livre, j’ai reçu beaucoup de messages de militants. Une militante féministe m’a confié :
Une femme s’est encore faite tuer par son conjoint dans notre ville. On a besoin de bras pour faire des actions, on s’en fout de savoir si nos militants sont cisgenres ou hétéros, on ne veut pas connaître leurs pronoms, on veut juste militer, sans se faire violer le soir.
A cause de cette lassitude, ils s’entredévoreront tout seuls.
Propos recueillis par Etiennette de la Ruffin pour Le Club de Valeurs actuelles.
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Une réponse à “Immersion secrète sur la planète Woke”
Tout n’est qu’incoherence chez les wokes ( = eveillé … a la connerie ).
Que des debiles !