Il est risible ou terrifiant, c’est selon, d’entendre la gauche parler des dégâts de l’ultra-libéralisme en France.
L’ultralibéralisme et même le libéralisme n’ont jamais été pratiqués effectivement dans notre pays.
La France représente 1 % de la richesse mondiale (PIB) mais redistribue 15 % des prestations sociales mondiales !
Les dépenses publiques explosent, les impôts et les taxes écrasent les particuliers et les entreprises. Les normes et la règlementation étouffent les initiatives !
Ce n’est pas la marque du libéralisme !
C’est la même chose pour l’Europe. Ce n’est pas elle qui est ultralibérale ! C’est la France qui est ultraétatiste !
Cette dernière phrase est le titre d’un article de Nicolas Lecaussin , directeur de l’IREF (Institut de Recherches Economiques et Fiscales) qui vient de donner une interview au Figaro. Interview que voici :
La faillite de l’étatisme à la française est l’une des causes principales de nos maux économiques et sociaux, plaide Nicolas Lecaussin, le directeur de l’IREF dans son nouvel essai : Les donneurs de leçons : Pourquoi la France est en vrac !
Le Figaro : Qui sont les donneurs de leçons que vous dénoncez dans votre essai ?
Nicolas Lecaussin : Ce sont les moralisateurs qui croient détenir la vérité et mieux savoir que les Français ce qui est bon ou mauvais pour eux : politiques, de gauche comme de droite, biberonnés à l’étatisme depuis des générations; hauts fonctionnaires sortis de l’ENA qui se sentent investis d’une mission quasi divine et s’opposent à toutes les réformes économiques et sociales ambitieuses, surtout lorsque celles-ci ont un parfum un tant soit peu libéral; journalistes dont beaucoup sermonnent mais si peu informent; intellectuels progressistes omniprésents dans les médias; écologistes tyranniques qui prétendent dicter nos conduites en préconisant toujours plus de taxes et de réglementations …
Le Figaro : C’est à cause de tous ces donneurs de leçons que la France va mal ?
Nicolas Lecaussin : J’en suis convaincu. Les politiques s’occupent de tout, légifèrent sur tout, notre bien-être, la fessée pour les enfants ou le remplacement des mots père et mère par les appellations parent 1 et parent 2. Mais au lieu de cet activisme brouillon, pourquoi ne réforment-ils pas la nation en profondeur ? La France est le seul grand pats riche et démocratique qui n’ait pas vraiment refaçonné son Etat après la crise de 2008-2009. Dans nombre de pays, les recettes libérales ont été adoptées avec succès. Ce sont les seules jamais tentées sérieusement en France. Résultat: notre pays est le champion du monde des prélèvements obligatoires et des dépenses publiques.
Le Figaro : Emmanuel Macron n’a-t-il pas promis des réformes ambitieuses ?
Nicolas Lecaussin : ll annonce des réformes qu’il ne fait pas. Macron a réussi un exploit : faire descendre les Français dans la rue sans même avoir réformé ! On l’accuse d’être libéral, mais il ne l’est pas. Il est progressivement devenu aussi étatiste que les autres. La baisse annoncée de l’impôt sur les sociétés se voit sans cesse repoussée. Les dépenses publiques continuent d’augmenter. Onze nouveaux prélèvements et taxes ont été mis en place depuis juin 2017 … Et que dire de la baisse ridicule du nombre de fonctionnaires ? Au rythme actuel, il faudrait plus d’une centaine d’années pour rattraper l’Allemagne. On est très loin de vraies réformes.
Macron fait un peu ce que Gorbatchev a tenté en Union soviétique, en essayant de réformer le communisme. Mais on ne pouvait pas réformer le communisme, il fallait s’en débarrasser. De même, Macron essaye d’améliorer le « modèle social français », mais c’est impossible : il faut choisir un autre modèle. Dans le monde actuel, ubérisé et mondialisé, on ne peut pas se contenter de réformettes; la perestroïka, cela ne marche pas. Pour que la France devienne un pays plus riche et plus compétitif, il faut oser la transformer en profondeur: réduire la place de l’État, ouvrir davantage les services publics à la concurrence du secteur privé, diminuer les impôts, mais aussi toutes les réglementations qui empêchent les entreprises de croître.
Le Figaro : Pourquoi le libéralisme fait-il si peur aux Français ?
Nicolas Lecaussin : Les Français ont une vision tronquée du libéralisme, déformée par une partie des médias et par l’Éducation nationale. Dans notre pays, on parle d’ailleurs plus volontiers d’ultralibéralisme que de libéralisme, comme si l’on voulait accentuer la peur du grand méchant marché. Même la droite française demeure étatiste, antilibérale et ne semble pas bien comprendre les ressorts de l’entreprise privée. Un élu LR me demandait voilà peu comment aider les entreprises au niveau local. Mais il ne faut rien faire justement ! Cessons de jouer les assistantes sociales et contentons-nous de laisser les entreprises agir …
Le Figaro : Qu’attendez-vous du grand débat ?
Nicolas Lecaussin : Le grand débat est une cacophonie générale: tout le monde réclame quelque chose. Les Français, infantilisés, ont été habitués à ce que I’État leur donne tout et s’occupe d’eux en permanence. Le gouvernement ne pourra pas contenter tout le monde. C’est la première fois, depuis que je travaille en France, que je suis inquiet pour l’avenir du pays. Pour l’heure, il n’y a pas de véritable alternative au pouvoir en place, si ce n’est l’opposition qu’incarnent Marine Le Pen et Jean-Luc Mélenchon, très proches idéologiquement. Tant que la droite classique n’aura pas compris qu’elle doit assumer des propositions fortes, libérales dans le domaine économique et fiscal, conservatrice sur le plan sociétal, le risque d’une montée des extrêmes demeurera.
Propos recueillis par Ghislain de Montalembert pour Le Figaro.
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