On n’en finit pas de gober les images et le symboles que la communication bien huilée d’Emmanuel Macron nous sert jour après jour !
La photo officielle fut dans ce domaine un modèle du genre mais plus encore son « making off » que l’on nous a transmis avec complaisance pour que rien ne nous échappe de toute la symbolique « cachée » derrière la photo : les deux téléphones empilés, l’horloge juste derrière leur maître (… des horloges), tel bouquin ouvert à telle page, etc …
On est loin de la photo de Hollande, de type instamatic jetable, prise dans les jardins de l’Elysée !
Je vous propose aujourd’hui une excellente analyse de la présidence Macron trouvée dans les blogs du Huffington Post sous la plume de Vincent Brendarth, avocat au barreau de Paris :
Pourquoi la présidence d’Emmanuel Macron
pourrait aboutir au renversement de la Ve République
Sa photo officielle est l’illustration d’un gaullisme 2.0. Sa présidence, une mise à jour de la pratique de la Ve République, qui donne un blanc-seing à la personnalisation du pouvoir. Mais le règne de l’image est risqué.
L’empressement quasi pathologique et ostensible d’Emmanuel Macron à vouloir s’inscrire dans l’Histoire est, par les moyens qu’il emprunte, révélateur d’une forme de modernité, où la consécration médiatique accède au rang de finalité.
Le destin d’une Nation ne peut toutefois se confondre avec une simple ambition individuelle que certains médias, comme hypnotisés, flatteraient et alimenteraient, sauf à contrevenir au principe même de la République: « gouvernement du peuple, par le peuple et pour le peuple ».
Rappelons qu’on présente généralement l’élection présidentielle comme la « rencontre d’un homme et d’un peuple ». L’idée, bien que prometteuse, ne résiste pourtant pas au constat sans appel d’une abstention qui fausse la représentativité, reflet tant d’un désintérêt croissant pour la « chose publique », que de l’absence d’adhésion quant au concept même de l' »homme providentiel ». L’on assiste, dans cette configuration, au sacre d’un chef de l’Etat à la légitimité démocratique précaire mais qui reste paradoxalement fort des outils que la Ve République et sa Constitution lui procurent.
Le parcours d’Emmanuel Macron inspire davantage l’idée d’une rencontre entre une ambition absolue, qu’il ne s’agit pas de mésestimer, et une Constitution, celle de 1958,
avec un peuple en arrière-plan, presque spectateur qu’on mobilise et qu’on agite à intervalles quinquennaux. Il est un fait que la rédaction de la Constitution, qui consacre la prééminence présidentielle (prééminence renforcée par l’élection au suffrage universel direct du Président depuis 1962), se prête parfaitement à l’ambition individuelle. Elle ne se dresse pas comme un obstacle mais, au contraire, la facilite, voire l’encourage.
Le piège qu’on voudrait nous tendre consiste, on le voit, à revendiquer l’héritage gaulliste, pour ce qu’il symbolise de rupture, tout en se réclamant du cadre de la Ve République dont le Général est le concepteur, celle-là même que l’abstention gangrène et qui a précisément conduit, curieuse et douce ironie, au rejet lors des dernières élections des « vieux partis » qui ont permis de l’animer pendant tant d’années.
Dans la continuité de cette Ve République, Emmanuel Macron est l’incarnation d’un hyper-présidentialisme nouveau, moderne et adapté à son temps, celui à l’affût de la formule qui sera partagée sur les réseaux sociaux,
du symbole que l’Histoire, si elle ne se dissout pas dans l’immédiat, retiendra. Sa pratique est une mise à jour, un « add-on », de la pratique de la Ve République, qui, tout en donnant l’apparence du renouveau, en exploite les largesses qui donnent un blanc-seing à une personnalisation du pouvoir, difficilement compatible avec l’effacement individuel que le projet collectif devrait commander.
La photographie officielle, dévoilée sur les réseaux sociaux, offre curieusement la réunion de ces volontés contradictoires, comme l’illustration d’un gaullisme 2.0; mélange de nouveau et d’ancien qui, à force de symbolique excessive, presque caricaturale, discrédite tant la fonction que celui qui l’incarne. Les idées sont désinvesties au profit du règne de l’image.
Relevons, en guise d’avertissement, que Julien Sorel admirait Napoléon et voyait dans l’hypocrisie le moyen d’atteindre ses ambitions. La surenchère des symboles présente son lot d’écueils, lorsqu’il n’est abandonné au peuple que le pouvoir de l’interprétation.
Par ailleurs, cette exploitation de la Constitution de 1958, comme outil de l’ambition individuelle est, outre son aspect présidentialiste, facilitée par le « fait majoritaire » qui permet un renforcement de l’exécutif. Sur ce point encore, la rupture/continuité s’exprime à nouveau.
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Vincent Brendarth pour le Huffington Post
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