McKinsey : un pilotage calamiteux de la crise du covid

Publié par le 10 Avr, 2022 dans Blog | 1 commentaire

McKinsey : un pilotage calamiteux de la crise du covid

Chaque jour qui passe apporte son lot de révélations et de critiques contre la politique sanitaire du pouvoir macronien.

Le scandale McKinsey voit son volet sanitaire s’aggraver chaque jour un peu plus. Il paraitrait même qu’un consultant de McKinsey assistait aux séances du Conseil de défense !

Le professeur Didier Raoult tape de plus en plus fort sur ce vaccin qui n’a de vaccin que le nom et qui s’avère désormais inefficace et dangereux.

Voici une interview de Barbara Siegler, philosophe, et François Alla, médecin,  réalisée par Marianne à l’occasion de la publication de leur ouvrage : Santé publique : année zéro :

« Le pilotage par McKinsey a créé une couverture vaccinale inversement proportionnelle aux besoins de santé »

Dans leur tract « Santé publique année zéro », la philosophe Barbara Stiegler et le médecin François Alla, également professeur de santé publique et directeur adjoint de l’Institut de santé publique, d’épidémiologie et de développement (ISPED), dénoncent la gestion de la crise sanitaire, qui a, selon eux, désorganisé la santé publique.

Marianne : Comment percevez-vous le fait que le gouvernement ait choisi de s’appuyer sur des cabinets de conseil lors de la crise sanitaire, notamment dans la campagne de vaccination ?

François Alla : Nous sommes dans une situation complexe. Une crise sanitaire, c’est un événement brutal qui peut potentiellement tout désorganiser. Pour surmonter ce type de crise, nous bénéficions en France des structures, des organisations et des compétences nécessaires, dans l’administration de la santé au niveau national et en régions, dans les agences sanitaires, chez les professionnels de santé notamment. Notre système a maintes fois prouvé sa solidité. Mais pour gérer cette crise, le pouvoir politique, notamment par manque de confiance dans les institutions de la République, a préféré passer outre les dispositifs et compétences existantes pour confier des missions stratégiques à des cabinets de consulting. Ces derniers ont largement démontré qu’ils n’avaient pas les compétences nécessaires, que ce soit en termes de connaissances techniques, du système, des acteurs ou des contextes. Cela contribue à expliquer les échecs français, du masque à la vaccination.

Barbara Stiegler : Oui, ce recours au consulting trahit la profonde défiance que ces nouveaux dirigeants, venus du monde du business et de l’entreprise, nourris à la fois contre l’État et contre le savoir académique. En s’enfermant dans son conseil de défense, Emmanuel Macron a choisi de trancher, à la fois sans l’État et sans les chercheurs, toutes les grandes orientations de la crise sanitaire.

Enfermé avec ses consultants à l’Élysée, il s’est tout de suite positionné en chef de guerre et a passé son temps à répondre à l’opinion publique, les yeux rivés sur les sondages.

En clair : il n’a pas hésité à instrumentaliser la crise sanitaire – avec ses morts et ses malades – au profit de ses propres intentions électorales et d’un programme de démantèlement de l’État, du système de santé et du milieu académique. Et c’est ce qui explique qu’il a tout de suite choisi d’évincer les experts en santé publique au profit de ses propres consultants, qui se désignent eux-mêmes comme les « champions » de la transformation des organisations. Cela lui a permis, par exemple, de se gargariser d’avoir obtenu les meilleurs chiffres en termes de couverture vaccinale.

Mais la réalité est qu’en France, le pilotage par McKinsey a créé une couverture vaccinale inversement proportionnelle aux besoins de santé : les plus âgés, les plus vulnérables ont été les moins vaccinés.

En « arrosant » tout le monde avec ces vaccins, le but était d’afficher des taux records pour répondre à l’opinion et aux médias. C’était de faire une politique du chiffre, et certainement pas de la santé publique. Et c’était aussi d’imposer un nouveau rapport à la santé, entièrement digitalisé.

François Alla : Cette volonté politique s’accorde bien avec les méthodes, les techniques, le schéma mental de ces cabinets de conseil. C’est la pensée « Power point », surpayée et simplificatrice, qui transpose les mêmes préconisations d’un pays à l’autre, ne prend pas en compte les contextes, ne s’embarrasse pas de subtilités. Or, la santé est un fait social éminemment complexe. D’un environnement à l’autre, et selon les différentes phases de la crise, ce ne sont pas les mêmes besoins, pas les mêmes contraintes, pas les mêmes réponses à apporter en milieu rural et urbain, en fonction de l’âge, de la situation socio-économique, des vulnérabilités préexistantes, de la situation épidémique dans tel ou tel territoire.

Mais les méthodes employées par ces cabinets lissent ces diversités par application d’un schéma unique. Ayant toujours le même programme, celui de transformer les politiques publiques en leur imposant les normes de l’entreprise, ils ne peuvent faire autre chose que réduire et simplifier. C’est ce qui mène à la désorganisation, à l’inadaptation de l’offre de santé aux besoins, et en particulier à l’aggravation des inégalités sociales et territoriales de santé.

Pour prendre un exemple concret, en France ce sont les plus pauvres qui ont été les plus contaminés, qui ont fait le plus de formes graves, et qui ont payé le pouls lourd tribut en termes de décès et paradoxalement ces mêmes pauvres ont été les moins dépistés et les moins vaccinés.

L’exemple que vient de donner Barbara Stiegler sur la vaccination est très juste. Le but était de faire du chiffre et d’imposer la digitalisation, mais sans se préoccuper de savoir si les bonnes personnes étaient vaccinées. On le paye encore aujourd’hui avec plusieurs centaines de décès par semaine. Autre exemple du caractère éminemment délétère de cette politique « taille unique », lorsqu’on a appliqué les mêmes mesures en termes de couvre-feux, confinements, plans blancs, sur tout le territoire, on a généré un frein ou un retard aux soins pour des centaines de milliers de personnes atteintes de maladies chroniques ou aiguës (cancer, infarctus du myocarde…). Les conséquences de ce qu’on peut qualifier de refus de soin généralisé seront lourdes, probablement plus lourdes que celles du Covid lui-même.

En quoi la gestion de la crise sanitaire est-elle le symptôme du passage d’un libéralisme classique à un nouveau libéralisme ?

Barbara Stiegler : Une des caractéristiques du libéralisme, c’est qu’il est une réflexion sur la multiplicité des pouvoirs et des contre-pouvoirs et qu’il affirme la nécessité absolue de limiter la concentration des pouvoirs. Comme je l’ai expliqué dans Il faut s’adapter (Gallimard, 2019), le nouveau libéralisme à tendance autoritaire qui émerge depuis un siècle dans notre aire culturelle n’hésite pas, au contraire, à s’emparer de l’État pour liquider progressivement ses missions d’intérêt général et pour accroître indéfiniment son pouvoir de coercition, au mépris de ce que préconisait le libéralisme traditionnel, en n’hésitant pas à bafouer ce qu’il percevait comme des droits fondamentaux ou des limites infranchissables. De ce point de vue, la crise sanitaire a constitué pour ce président et ses cabinets de conseil un formidable effet d’aubaine. Elle a permis de mettre brutalement au pas toute la population, tout en donnant des signaux à un électorat qui voulait de l’ordre, a fortiori après la crise des gilets jaunes.

La communication de guerre a tout fondé à partir de là sur la peur, avec le directeur général de la santé qui égrenait tous les soirs les morts à la télévision.

Cette communication de guerre dont on paye encore aujourd’hui les lourdes conséquences en termes de santé mentale n’était pas seulement le fruit de l’incompétence de nos gouvernants. C’était là encore une « innovation » de ces cabinets de conseil, experts en fabrication du consentement. C’est tout cela qui a mené à la mise en place du « passe sanitaire ». Il n’a certes pas été inventé par McKinsey, ni par Emmanuel Macron. Il a d’abord été imposé en Chine, puis en Israël. Mais ce dispositif inventé par les pays les plus autoritaires dans la gestion du Covid a été repris avec enthousiasme par les pays où ce nouveau libéralisme s’était imposé, et qui n’hésitait plus à conditionner l’exercice des droits à des devoirs antécédents, ceux-là mêmes définis par les dirigeants au fur et à mesure de la crise : le Canada de Justin Trudeau, l’Italie de Mario Draghi et la France d’Emmanuel Macron.

En quoi ce passe symbolise-t-il ce libéralisme autoritaire dont vous parlez ?

Barbara Stiegler : Il trahit tous les principes fondamentaux de notre République. C’est un dispositif quasiment automatisé, qui fait que le chef de l’État peut, sur la base de sa décision personnelle, considérer que vous perdez tel ou tel droit.

Que le Conseil constitutionnel ait validé une telle aberration juridique est extrêmement inquiétant.

Cet exemple illustre l’endogamie régnant entre les cercles dirigeants, les milieux économiques, les cabinets de conseils et les institutions de notre République, qui sont de plus en plus gangrenées par ces nouvelles pratiques, trahissant le sens de leurs missions fondamentales, à savoir : juger, soigner, éduquer, etc.

Ce « passe » remet en cause les principes de notre République, mais aussi des éléments de notre droit et en l’occurrence du Code de la santé publique. Prenons la loi Kouchner de 2002, qui stipule que chacun doit prendre les décisions qui concernent sa santé sur la base d’un consentement libre et éclairé. Je ne vois pas comment le « passe sanitaire » est possible de ce point de vue là. Beaucoup de soignants s’inquiètent de ces dérives. Le monde des juristes également, qui a été particulièrement actif pendant la crise sanitaire en multipliant les alertes et le travail de tribune.

Ces évolutions délétères ne sont d’ailleurs pas nées du Covid. Elles ont commencé à s’imposer à la suite du 11-septembre, lorsque s’est installé une sorte d’état d’urgence permanent avec son fameux « effet cliquet », bien connu des juristes, qui fait que lorsqu’on accepte une première restriction, il est très difficile de remonter le courant et de revenir à la situation antérieure. Risquant de s’installer dans le droit commun, le dispositif du « passe » est tout à fait emblématique de ce nouveau libéralisme autoritaire.

Selon vous, cette crise marque la suspension de la démocratie sanitaire, qui lie santé et liberté. Pouvez-vous revenir sur le lien entre ces notions ?

François Alla : La démocratie sanitaire en France a été imposée par la loi Kouchner, votée le 4 mars 2002, dont on commémore juste les vingt ans. Cet ensemble de principe et de dispositifs a défini des droits individuels pour les patients, inscrits dans le Code de santé publique, dont l’accès du patient à son propre dossier, emblématique de cette loi. Mais, on a tendance à aujourd’hui l’oublier, la démocratie sanitaire, ce sont aussi des droits collectifs. Cette loi est d’ailleurs née du mouvement collectif des associations contre le VIH/Sida. Ces droits collectifs se sont notamment traduits par la représentation des patients dans les établissements et par la mise en œuvre d’instances de concertation à toutes les échelles de la décision, du national au territorial, qui associent l’ensemble des parties prenantes du système de santé, comme, par exemple, la Conférence régionale de santé et de l’autonomie que je dirige en Nouvelle-Aquitaine. Dans le cadre de la crise, ce dispositif que l’on pensait solide car ancré dans notre histoire et notre contrat social a pourtant été mis entre parenthèses.

Le gouvernement a tout simplement suspendu nos droits individuels en santé. Effectivement, il n’y a pas de vaccination obligatoire. Mais si je ne me vaccine pas, je ne peux pas aller travailler, prendre certains transports ou avoir une vie sociale. Respecte-t-on ici l’autonomie ? Le pouvoir a aussi suspendu les droits collectifs. Même le conseil scientifique créé par l’Élysée et dirigé par Jean-François Delfraissy s’en est ému. Mais il a reçu une fin de non-recevoir à sa demande d’associer les citoyens à la décision.

Cette suspension des libertés n’était-elle pas indispensable pour faire face à la crise ?

François Alla : Chez certains décideurs, une idée reçue très répandue est que la concertation est une perte de temps. Qu’en situation de crise, il faut décider vite et donc décider seul. Nous sommes en guerre disait-il, et en guerre, le soldat n’est pas consulté sur la stratégie et la tactique… Mais cette analyse est une erreur majeure. Ce qu’on pense gagner en rapidité de la décision, on le perd en efficacité de la mise en œuvre. La mise en œuvre est inefficace car les parties prenantes n’adhérant pas à une décision « venue d’en haut », parfois cela génère même des crispations voire des oppositions massives. Ce qui s’est passé aux Antilles en est une parfaite illustration. Elle est aussi inefficace, car elle ne peut être que simplificatrice. En effet, quand on décide tout seul, on ne peut prendre en compte la complexité liée à la diversité des situations. On l’a vu avec la stratégie de vaccination, qui n’a pas pris en compte les millions de Français qui n’avaient pas accès à Internet par exemple.

Cette politique autoritaire, d’un homme seul décidant pour tous, et s’appuyant pour sa décision de conseils de cabinets incompétents est un cocktail délétère contribuant pour beaucoup à expliquer la désorganisation complète de l’offre de soin que l’on a connu, expliquant le drame vécu par les Ehpad, expliquant l’aggravation des inégalités pendant la crise, expliquant que la France a atteint des records en termes d’atteinte à la santé mentale de la population, notamment des plus jeunes.

Barbara Stiegler : Les manuels d’éthique distinguent les morales déontologiques, celles qui partent des grands principes qu’on ne peut en aucun cas transgresser, comme, par exemple, les droits de l’homme, et les morales conséquentialistes, celles qui s’interrogent sur ce qui maximise l’utilité générale, quitte à enfreindre ces grands principes. De ce point de vue, la prétendue stratégie sanitaire adoptée pendant deux ans a été une double faillite. Partout sur le territoire, des armées de soignants et de professionnels de toutes sortes se sont mises à transgresser les principes fondamentaux de notre République pour un résultat sanitaire particulièrement inefficace, tant en nombre de morts qu’en effets collatéraux liés aux mesures de restriction. La France n’est malheureusement pas le seul pays à avoir fait des choix délétères.

Mais dans notre pays, ce bilan s’est drapé à la fois dans le pragmatisme du chef et dans un prétendu égalitarisme républicain, invoquant sans cesse le bon citoyen épris de l’intérêt général. La réalité décrite par notre bilan sanitaire est tout autre : elle révèle un pays qui s’est laissé largement soumettre à ce gouvernement parallèle par le monde du consulting, uniquement préoccupé par les diktats de l’innovation (numérique et biomédicale) et par l’affaiblissement méthodique de toutes les institutions de la République.

* Barbara Stiegler & François Alla, Santé publique année zéro, Gallimard, collection « Tracts », 64 p., 3,90 €

Propos recueillis par Kévin Boucaud-Victoire.

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Une réponse à “McKinsey : un pilotage calamiteux de la crise du covid”

  1. Ben voyons, c’est la faute au libéralisme, j’ai arrêté de lire après.

    Un pays où l’Etat bouffe près de 60% du PIB ne laissant que 40% au privé est un état plus proche du communisme que d’autre chose. Le libéral, le vrai, laisse les gens libres de se vacciner ou pas sans plus les enquiquiner. Etre libéral est être responsable de soi-même et de faire ses choix en fonction de ce qui semble le mieux, à tort ou à raison. Etre libéral n’est pas de mettre en oeuvre des Ausweis, ce n’est pas interdire de se promener à plus d’un kilomètre de chez soi et de se faire contrôler avec un laissez-passer intrusif et liberticide.

    D’ailleurs, nous glissons de plus en plus vers un totalitarisme soft, rappelons que le totalitarisme envisage la création d’un homme nouveau, qui est appelé à penser correctement à travers l’unanimisme de la presse et des médias en général, de la censure qui se met en place me semble t-il dans différents réseaux sociaux pour éteindre les voix dissidentes, qui endoctrine les enfants dès leurs plus jeune âge pour leur apprendre ce qui est bien ou mal plutôt que de leur enseigner à penser par eux mêmes.

    Si tout ceci relève du libéralisme, moi je suis Archevêque de Canterbury.

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