L’article de Seymour Hersh affirmant que ce sont bien les services américains qui ont détruit les gazoducs Northstream en mer Baltique fait couler beaucoup d’encre et suscite les critiques, mettant en doute le sérieux de l’enquête.
Mais au-delà de celle-ci, un fait s’imposait d’entrée : ce ne sont pas les Russes qui sont les auteurs de l’opération. Parce qu’ils n’y avaient aucun intérêt, mais aussi parce que cela leur était techniquement impossible.
Vous venez de lire l’introduction d’un article publié dans Le Courrier des stratèges, le site créé par Eric Verhaeghe :
Sabotage des Nordstream : l’innocence des Russes
était d’emblée évidente, par Philippe Migault
Il n’est pas question de soutenir que les Russes ne savent pas le faire : La Russie a bel et bien les moyens techniques de réaliser une telle action d’éclat. Elle dispose pour cela de neuf submersibles destinés aux opérations spéciales. Tous appartiennent à la flotte du Nord. Ils opèrent depuis l’Arctique au sein d’un escadron de sous-marins, le 29e escadron spécial, basé dans la baie d’Olenya, sur la presqu’île de Kola, une des zones placées en permanence sous la surveillance des satellites militaires américains. Parmi ces sous-marins, trois, gigantesques, avec une taille variant de 166 à 184 mètres de long et un déplacement allant de 18 000 à près de 30 000 tonnes en immersion, sont des « bateaux-mères ». Ils mettent en œuvre des submersibles plus petits qui, une fois transportés sur zone, peuvent servir de base de départ à des plongeurs de combat, formés à faire sauter tous types d’installations, dans un port ou en pleine mer. Le problème est qu’au moment où les gazoducs ont sauté les trois sous-marins en question, qui ne peuvent guère appareiller sans que leur départ soit détecté compte tenu de leur taille et de la surveillance constante dont ils font l’objet, étaient en Arctique.
Les Russes ne sont pas des James Bond
L’un, le Biélogorod, le fameux porteur de torpilles nucléaires Poséidon était en manœuvres. Il n’a pas bougé de sa zone d’exercices. L’autre, l’Orenburg, était en cours de maintenance, à quai. Le dernier, le Podmoskovie, était opérationnel. Mais comment aurait-il pu remplir cette mission sans être détecté ? Lancé en 1982, cet ancien SNLE a un mode de propulsion bruyant. Il aurait fallu qu’il quitte sa base, sans être détecté, qu’il longe les côtes de la Norvège, où patrouillent en permanence des navires et des avions de lutte ASM de l’OTAN, sans être remarqué. Puis il aurait dû franchir le barrage GIRU, dispositif de détecteurs acoustiques occidentaux échelonnés entre la côte du Groënland, l’Islande, le Royaume-Uni et le sud de la Norvège, sans émettre de son audible. Arrivé vers Oslo, dans le Skagerrak, premier des détroits danois faisant la jonction avec la mer Baltique, il aurait dû passer le Kattegat.
La profondeur maximale de ce dernier est de 109 mètres, pour une largeur minimale de 56 kilomètres. Pour un SNLE, cela revient à se faufiler dans un trou de souris en plein territoire ennemi. Mais admettons. Au bout du Kattegatt, il existe plusieurs options pour entrer en Baltique et faire route vers la zone de l’île de Bornholm, où le sabotage a eu lieu : soit passer par le Sund, soit passer par les Belts, bras de mer séparant les îles de l’archipel danois entre elles, et le Danemark de la Suède. Le Sund fait 4 kilomètres de large dans sa partie nord, entre Kronborg et Helsinborg. Sa profondeur maximale est de 40 mètres. Sur ses rives sont situées Copenhague et Malmö. Imagine-t-on les Russes passer là avec un sous-marin, discrètement, en pleine crise internationale ? Un sous-marin à propulsion nucléaire de surcroît ? Reste le Grand Belt. 60 mètres de fond. A sa sortie, au sud, la base allemande de Rostock à quelques encablures. Guère plus crédible.
Certes le Podmoskovie, bateau-mère, aurait pu mettre en œuvre un petit submersible pour passer les détroits et remplir cette mission. Il aurait fallu que celui-ci, également à propulsion nucléaire, se glisse dans l’un de ses goulets sans être vu. Nous pouvons quasiment suivre en direct les faits et gestes du moindre bataillon russe en Ukraine, mais nous ne détecterions pas un bâtiment de plusieurs centaines, voire milliers de tonnes, suivant le type, pataugeant sous notre nez dans ce qui, pour lui, s’apparente à une mare ? Invraisemblable. Les Russes ne sont pas des James Bond.
La Baltique, un cul-de-sac pour les marins russes
En toute logique, on peut penser que si les bâtiments de la flotte du Nord n’étaient pas en mesure de remplir cette mission, ceux de la flotte de la Baltique étaient tout désignés pour le faire. Sauf qu’il n’existe aucun plongeur, aucun équipage, aucun navire russes formés à ce type de missions ultra-sensibles en Baltique.
Certes, rien n’est plus facile pour une équipe que de prendre un train ou un avion entre Mourmansk ou Severodvinsk et un port de la Baltique. Mais ils auraient vraisemblablement dû opérer depuis un navire de surface ayant discrètement appareillé depuis Saint-Pétersbourg ou Baltyisk, dans l’oblast de Kaliningrad.
Depuis Saint-Pétersbourg, il y a près de 370 kilomètres de mer à faire avant de sortir du Golfe de Finlande, qui se rétrécit jusqu’à 50 kilomètres de large, le tout entre les côtes de deux Etats dont l’un, l’Estonie, est membre de l’OTAN et l’autre, la Finlande, demande à l’intégrer. Puis il y a presque 700 kilomètres jusqu’à Bornholm, dans des eaux jalonnées de bases navales suédoises. Plus de 1 100 kilomètres de mer donc, sans être détectés. Une formalité…
Depuis Baltyisk, il n’y a que 350 kilomètres de mer jusqu’à la zone d’action. Mais Baltyisk est située dans l’enclave de Kaliningrad, que l’OTAN scrute depuis des années à la loupe, et sur la rive est de la baie de Gdansk. Sur la rive ouest, à moins de 90 kilomètres il y a la base navale polonaise de Gdynia… Des avions de patrouille maritime de l’OTAN sont sur zone, tous les jours, 24 heures sur 24, 365 jours sur 365… Et les Russes seraient passés inaperçus ? Comment prêter foi à un tel scénario ?
Dans les faits la Baltique est un cul-de-sac pour les marins russes, qui ne peuvent faire tourner une hélice sans que nous le sachions.
Au demeurant, si un sous-marin ou un navire de surface russe suspect avait été détecté près de Bornholm, les Occidentaux n’auraient pas manqué de le claironner dans tous leurs médias. Il n’y a pas eu un son.
Les Russes non coupables, il suffit de chercher à qui le crime profite. Seymour Hersh a peut-être, comme le prétendent certains de ses collègues, bâclé son enquête. Ce qui est sûr c’est que celle des Occidentaux sur ces sabotages est bouclée et que s’il y avait de quoi inculper la Russie, ce serait fait depuis longtemps. Quant au silence des Allemands, des Suédois et des Danois, il est plus éloquent qu’une accusation en bonne et due forme vis-à-vis de Washington.
Voici l’hypothèse la plus crédible de la façon dont les gazoducs auraient été détruits :
- Placement d’explosifs C4 sur le gazoduc par des plongeurs-commandos,
- Largage par avion d’une balise émettrice d’ondes sonores se propageant dans l’eau,
- Détection de ces ondes codées par le C4 et déclenchement de l’explosion.
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2 Réponses à “On sait qui a fait sauter les gazoducs Nord Stream !”
Je partage aussi ce point de vue, ce ne sont pas les russes qui l’ont fait, mais les occidentaux et particulierement les americains qui y avait le plus interet a le faire.
Le reste c’est du bla bla.
A qui profite le crime?
Qui a, depuis, vendu son gaz? la Norvège et les USA!
Qui va continuer à le vendre à la fin de la guerre? la Norvège et les USA!
Du complotisme????