Si les Français avaient choisi Balladur plutôt que Chirac

Publié par le 12 Mai, 2024 dans Blog | 1 commentaire

Si les Français avaient choisi Balladur plutôt que Chirac

En 1993, en pleine cohabitation, François Mitterrand nomme Edouard Balladur à Matignon, car Jacques Chirac préfère se préparer pour l’élection présidentielle de 1995.

Il est fascinant de noter la composition du gouvernement qu’il nomme  avec des fortes personnalités telles que Simone Veil, Charles Pasqua, Pierre Méhaignerie, François Bayrou, Nicolas Sarkozy, François Fillon ou encore Michel Barnier, et de les comparer aux inconnus transparents qui peuplent les gouvernements de Macron !

En 1995, fort d’une popularité importante, Edouard Balladur trahit son « ami de 30 ans », Jacques Chirac en se présentant, contre lui, à l’élection présidentielle.

Il échoue de peu, 18,58 % des voix contre 20,84 % à Chirac, qui sera élu à l’Elysée.

Que se serait-il passé si Balladur avait gagné ?

La question est légitime et on peut penser que l’avenir politique de la France en eut été changé. En effet, Nicolas Sarkozy, qui avait soutenu Balladur et donc trahit Chirac, n’aurait pas eu de traversée du désert et aurait probablement été nommé premier ministre.

On aurait échappé ainsi au second mandat de Jacques Chirac qualifié par le dit-Sarkozy de « roi fainéant » ! La droite se serait durablement rétablie au pouvoir et la parenthèse socialiste eut été refermée sans doute pour longtemps.

Il n’est pas interdit de penser que la France aurait évité le quinquennat calamiteux de François Hollande et ceux désastreux de Macron !

Mais pourquoi parler d’Edouard Balladur aujourd’hui ?

Parce que malgré ses 95 ans qu’il vient de fêter il y a quelques jours, l’ancien premier ministre garde toutes ses facultés intellectuelles comme il nous le montre dans une impressionnante tribune qu’il vient de publier dans Le FigaroVox et que je me propose de relayer ici en deux parties compte tenu de sa longueur :

Europe, libéralisme, arme nucléaire :
les propositions chocs d’Édouard Balladur

Dans un texte-fleuve, l’ancien premier ministre exprime ses vues sur la place de la France au XXIe siècle. Il appelle à une pause de tout élargissement de l’Union européenne avant une réforme profonde de ses institutions.

Le XXIe siècle sera rude pour la France. Elle n’est pas seulement menacée, mais déjà victime d’un déclassement économique, social, culturel, diplomatique, militaire.

On sait bien ce qu’il faut faire : réduire un endettement désastreux, exclure toute hausse d’impôts, revoir tout le système de transferts sociaux, faire au moins 30 Mds de réduction des dépenses publiques par an et sans doute bien davantage, les évaluations changent tous les jours.

Aura-t-on la clairvoyance et le courage d’agir ? J’en doute. Le nombre de fonctionnaires a augmenté d’un million en vingt-cinq ans. Les dépenses publiques représentent 57 % de la richesse produite. L’endettement public a augmenté de 1.000 milliards d’euros en sept ans, il atteint désormais plus de 3.000 milliards d’euros au total. En outre, la France croule sous les interventions autoritaires de l’État, la complication, l’alourdissement des règles et des contraintes bureaucratiques découragent la liberté d’initiative.

Le gouvernement s’obstine à affirmer que le retour au plein-emploi réglera tous les problèmes. Nul ne voit comment. Des projections jusqu’à la fin du siècle montrent qu’alors la France ne sera plus que la 25ème puissance économique au monde et non plus la sixième ou la septième. Je n’ai pas l’espoir de voir sa situation s’améliorer de mon vivant, d’autant que la violence s’aggrave au sein de la société, la jeunesse refuse les contraintes et l’autorité, y compris celle des parents, les Français dans leur grande majorité pensent qu’on doit y porter remède, ils appellent au retour de l’ordre et déplorent l’action des juges qu’ils estiment trop timide. Ils ne s’y résigneront pas.

Dans le même temps, le désordre et la guerre s’accroissent dans le monde. L’Ukraine, agressée par la Russie, est en danger, l’Europe s’est portée à son secours, elle lui propose de l’intégrer tout de suite à l’Union européenne, ce qui est une erreur, elle n’en a ni les moyens financiers, ni les moyens militaires. Il lui suffirait dans une première étape de conclure avec elle un accord, dans le cadre de la théorie des cercles selon laquelle tous les pays européens ne sont pas en mesure d’exercer en commun les mêmes compétences au même moment, qui permet à l’Union de diversifier son rôle avec ses voisins et de l’adapter aux circonstances.

La France doit réagir avec rapidité et énergie. Il y va de son destin même. Outre le redressement intérieur qu’elle doit opérer d’urgence, elle doit agir dans trois domaines : l’Europe, le libéralisme économique, l’armement nucléaire.

1 – S’agissant de l’Europe

j’ai publié il y a quelques mois, grâce à Fondapol, mes réflexions. Tout est dit dans le titre « L’Europe est nécessaire, la France aussi ». Il ne s’agit pas de les opposer l’une à l’autre, mais de les amener à coopérer dans un respect réciproque.

En 1992, j’ai voté la ratification du traité de Maastricht conclu entre douze États membres. À mes yeux, il avait un contenu précieux et utile : la création de la monnaie européenne, une politique commerciale commune, un grand marché commun avec libre circulation des hommes, des produits et des capitaux.

Malheureusement, on ne s’en est pas tenu là.

Ont régné la confusion des responsabilités, l’égalité de la représentation des États sans tenir compte de leur importance, la fuite en avant, les compétences de l’Union étant étendues à la défense, à l’immigration, à la compétitivité, la proposition d’accueillir une dizaine au moins de nouveaux membres aussi exigeants que mal préparés.

Le traité de Lisbonne, conclu le 13 décembre 2007 entre vingt-sept États membres, reprend l’essentiel du traité de Rome de 2004 établissant une Constitution pour l’Europe, rejeté par référendum par le peuple français. Son orientation générale consiste à s’éloigner du caractère intergouvernemental des institutions européennes pour se rapprocher d’un mode de fonctionnement plus intégré. C’est ainsi que, tout en étendant au bénéfice de la Commission les champs d’application du droit européen, il renforce l’indépendance du président de la Commission par rapport aux États. Il prévoit que la Commission, qui cesse d’être responsable devant le Conseil, est investie, et peut être censurée par le Parlement. Chaque État membre ne dispose plus que d’un commissaire et le Conseil européen perd son rôle prépondérant. En d’autres termes, du traité de Maastricht à celui de Lisbonne s’est opéré, sous l’effet des élargissements successifs de l’Union et du rôle accru reconnu aux petits États, un glissement sensible vers le fédéralisme, marqué par le renforcement, dans le fonctionnement de l’Union, des institutions les plus éloignées de la légitimité du suffrage populaire.

Tentons de mettre ordre et clarté dans un débat tellement confus.

L’Union européenne est mal organisée, soit elle se réformera elle-même, soit elle éclatera.

Il ne faut pas opposer l’Europe et la France, les deux ont leur place dans les institutions européennes, ce n’est pas tout l’un ou tout l’autre.

Il ne faut pas se précipiter et élargir à toute force l’Union européenne à des pays de l’Est européen, mais observer une pause.

Déclarer la souveraineté de l’Union dans certains domaines exclut la souveraineté des États membres de l’Union. En la matière, il n’y a pas possibilité de partage. L’élargissement des compétences de l’un exclut les compétences de l’autre.

S’agissant de la réglementation de l’immigration c’est à la France de décider souverainement qui est compétent pour ce faire.

Cela ne peut être que le peuple français, auteur exclusif de nos institutions. En la matière, il n’y a de légitimité que la sienne. La décision revient au référendum afin de modifier la Constitution et de préciser les pouvoirs de chacun.

Les institutions de l’Europe ne doivent laisser aucune place au fédéralisme qui comporterait le vote à la majorité substitué au vote à l’unanimité.

Il faut faire revenir le Conseil constitutionnel à sa compétence naturelle , y faire revenir aussi les diverses institutions nationales, européennes ou internationales qui s’arrogent le droit de créer un droit européen nouveau en interprétant les traités à leur guise avec pour effet sinon parfois pour but l’affaissement de la souveraineté de la France. Il s’agit du Conseil d’État, du Conseil constitutionnel, de la Cour de cassation, de la Cour européenne des droits de l’homme et de la Cour de Justice de l’Union européenne.

Comme le propose l’appel de cinquante personnalités sur le « tour de vis fédéraliste » de l’Union européenne qui est désormais officiellement projeté, le saut qualitatif dans l’inconnu d’un système supranational qui minore l’existence des nations au profit d’une Commission qui porterait officiellement le titre d’« Exécutif », coiffé d’un « Président de l’Union européenne » doit être soumis au référendum. L’objectif est clair : exclure le fédéralisme, réguler l’immigration.

J’en ai conclu pour ma part qu’il fallait différer tout nouvel élargissement en attendant d’élaborer un code clair et précis des compétences de l’Union et des États-membres.

Il nous faut surtout retrouver notre souveraineté nationale en matière de contrôle de l’immigration, l’avenir même de la France en dépend. Jadis en tant que Premier ministre, s’agissant du droit d’asile, j’ai eu recours à un véritable lit de justice afin d’imposer au Conseil constitutionnel la primauté souveraine du peuple français, seul à détenir la légitimité nécessaire pour décider quelle doit être sa Constitution, et qui doit être autorisé à entrer sur son sol. Nous enregistrons chaque année une immigration de près de 500.000 personnes qui, pour des raisons juridiques diverses, ne peuvent être contraintes au retour dans leur pays d’origine. C’est la raison pour laquelle doit être organisé un référendum pour modifier l’article 11 de la Constitution. Le Conseil constitutionnel sera contraint de s’incliner devant le peuple souverain.

Edouard Balladur pour Le FigaroVox.

A suivre …

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Une réponse à “Si les Français avaient choisi Balladur plutôt que Chirac”

  1. une analyse à laquelle beaucoup d’électeurs de droite devraient souscrire … s’ils en étaient informés ! Car au lieu de faire la Une elle est publiée dans le FigaroVox pour être vite oubliée, pendant que les déclarations de Macron sont partout.
    Quant au Point, par respect pour la mémoire de Claude Imbert je n’en dirai pas plus …

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