On me pardonnera, j’espère, cette familiarité qui m’a été inspirée par cette fameuse déclaration de Pierre Dac :
« Si ma tante en avait, on l’appellerait mon oncle,
et si mon oncle en était, on l’appellerait ma tante. »
Oui, il serait temps que les Républicains choisissent leur genre et leur camp !
Et surtout, montrent un peu de clarté et de courage !
De plus en plus d’exemples, dans le monde, montrent que les Conservateurs et la Droite en général peuvent retrouver la confiance du peuple et reconquérir le pouvoir, pourvu qu’ils retrouvent leurs valeurs fondatrices et qu’ils s’en montrent à nouveau fiers !
Ce sont les pays de l’Est qui nous montrent le chemin en défendant leur identité, un vocable devenu un gros mot en France. C’est Donald Trump qui a gagné en faisant basculer dans son camp plusieurs états acquis depuis des décennies aux Démocrates. Et récemment, c’est Boris Johnson qui vient de donner aux Tories une majorité inconnue depuis Margaret Thatchert !
Sébastien Pilard, vice-président du conseil régional des Pays de la Loire, secrétaire national du parti Les Républicains et cofondateur de Sens commun pense que la victoire aux législatives britanniques du Premier ministre conservateur est une preuve que le courage politique est indispensable au renouveau.
Il tente de le démontrer dans cet interview parue dans Le Club de Valeurs actuelles :
“Le succès de Boris Johnson est une source d’espoir
et d’inspiration pour la droite française”
Valeurs actuelles : Comment la victoire de Boris Johnson a-t-elle été perçue chez Les Républicains ?
Sébastien Pilard : Difficile de répondre au regard du faible nombre de réactions. Cette frilosité est malheureusement symptomatique du flottement idéologique qui règne actuellement au sein de notre parti. Cette inertie est assez paradoxale alors que le succès de Boris Johnson est justement une source d’espoir et d’inspiration pour la droite française.
En assumant une ligne claire, conservatrice et populaire sur le fond, transgressive et dynamique sur la forme, Boris Johnson a prouvé que la droite peut se réconcilier avec les classes populaires et ouvrières. C’est ce qu’il a fait en ravissant aux travaillistes de nombreuses circonscriptions du nord qui leur étaient acquises depuis des décennies, un peu comme l’avait fait Donald Trump en 2016, en gagnant dans des comtés clés pourtant habitués à voter démocrates. La droite comme la gauche ont oublié le peuple depuis trop longtemps, en ne s’affranchissant ni des élites ni des minorités, et en adhérant sans sourciller au camp du progressisme et de la mondialisation débridée.
Certains qualifient Boris Jonhson de « populiste », dans le seul but de le discréditer. Mais ce n’est qu’un retour aux sources du conservatisme qui répond parfaitement à la fracturation de nos sociétés actuelles. Benjamin Disraeli, fondateur du Parti conservateur dans les années 1840, Premier ministre britannique de 1874 à 1880, avait comme principal préoccupation de lutter contre la coupure de son pays en « deux nations qui ne se connaissent pas et se méfient l’une de l’autre ». N’est-ce pas cruellement d’actualité ?
Valeurs actuelles : Après Trump, Orban, Salvini… la victoire de Johnson semble confirmer le duel populistes-mondialistes, déjà amorcé lors du second tour des présidentielles avec Emmanuel Macron et Marine Le Pen. Quelle place pour LR dans ce nouvel équilibre ?
Sébastien Pilard : Boris Johnson a justement démontré qu’une troisième voie était possible ! Alors que les Tories sortaient laminés des élections européennes (moins de 10% des voix, à peine plus que LR), ils ont réussi l’exploit d’offrir la plus forte majorité conservatrice au Parlement britannique depuis Margaret Thatcher, en réconciliant populistes et conservateurs, petite bourgeoisie, classes moyennes et classes populaires.
Mais ce retournement ne s’est pas fait tout seul. Il a d’abord fallu que Boris Johnson, compte tenu du scrutin à un seul tour en Grande-Bretagne, convainque Nigel Farage de ne pas présenter de candidats contre son parti, pour faire enfin passer le Brexit, conformément à la volonté du peuple britannique.
Ensuite, Johnson a clairement choisi de rompre avec une vision exclusivement comptable de la politique. Il a fait le choix de mettre l’Etat au service de la protection de son peuple avec par exemple un meilleur système de santé tout en conservant cette volonté de réduire les dépenses publiques inutiles ou clientélistes et sans pour autant tomber dans une logique d’assistance généralisée telle que certains le proposent aujourd’hui. En mettant plus de service public où il est nécessaire et moins où cela n’a aucun intérêt, il souhaite finalement en finir avec la tyrannie des minorités et mettre sa politique au service de la majorité.
Enfin, il a su proposer ce que le journaliste David Goodhart appelle un « populisme bon teint », capable de réconcilier conservateurs et populistes, et de répondre aux aspirations de ceux qu’il appelle les « enracinés », notamment par un projet de lutte massive contre l’immigration et l’insécurité. A l’instar de Sebastian Kurz, largement réélu en septembre, ou de Viktor Orban, qui sont nos alliés au PPE, Boris Johnson est lui aussi plébiscité par son peuple. Même si chaque pays a ses propres spécificités, cela doit nous faire réfléchir pour la suite.
A travers le Brexit, Boris Johnson a démontré qu’avec de la détermination il était possible de faire quelque chose d’inconcevable aux yeux des progressistes : revenir en arrière.
Chez LR, nous avions lancé en 2018, un tract, qui avait d’ailleurs fait polémique en interne, ayant pour titre « Pour que la France reste la France ». A l’heure où les Français subissent une sorte de déclassement et souffrent d’une insécurité aussi bien culturelle et qu’économique, j’ai la conviction qu’ils peuvent se retrouver autour de cette ambition pour que la France retrouve sa place dans le monde, maîtrise son avenir et sa souveraineté, conserve sa culture et son identité, puisse recréer cet environnement nécessaire pour le développement de nos entreprises et de notre industrie, arrête de courir derrière ce progressisme fou qui déstructure notre civilisation et remette le travail ainsi que le mérite au cœur de nos politiques.
Pendant plus de quarante ans nos gouvernements ont voulu réformer, transformer, révolutionner. Mais ils ont oublié leur mission principale : défendre et protéger. Il est donc désormais urgent pour nous d’être en mesure de proposer une philosophie politique mais surtout un modèle de société qui réponde aux aspirations profondes des hommes et des nations.
Valeurs actuelles : La victoire de Johnson risque-t-elle de diviser Les Républicains en renforçant le courant conservateur ?
Sébastien Pilard : La priorité est-elle au rassemblement – quoiqu’il en coûte – ou à la cohérence idéologique ? Au consensus tiède ou au courage ? Au rassemblement du peuple français ou uniquement de quelques élus ? C’est finalement cela la véritable question. En tout cas, j’ai une certitude : je ne suis pas Macron compatible et ce n’est pas en entretenant le flou avec En Marche que nous pourrons refonder la droite. C’est la raison pour laquelle nous avons interpellé Christian Jacob avec une dizaine de membres du bureau politique à propos des certaines accointances locales avec En Marche pour les élections municipales.
Valeurs actuelles : Quelle leçon en tirer ?
Sébastien Pilard : La principale leçon est certainement cette soif qu’ont les peuples de clarté, de cohérence et de courage politique. Nous pourrons emmener les Français qu’à la condition de ne pas les prendre pour des idiots. Comment imaginer les convaincre en additionnant dans son équipe des forces contradictoires ? Proposer une vision claire et cohérente portée par des personnes capables de ne pas reculer devant la bien-pensance et le politiquement correct, des personnes dont l’engagement politique est animé par des convictions sincères est, je pense, une voie à emprunter.
La deuxième leçon est, qu’à travers le Brexit, Boris Johnson a démontré qu’avec de la détermination il était possible de faire quelque chose d’inconcevable aux yeux des progressistes : revenir en arrière. Il met un terme à ce sentiment que, quelque-soit les bords politiques, le sens de l’histoire imposé par les progressistes serait inéluctable.
Enfin, la dernière leçon à en tirer concerne la personnalité de Boris Johnson : on peut avoir le meilleur programme, encore faut-il pouvoir l’incarner à travers une figure forte. C’est tout l’enjeu du camp des conservateurs de chercher et de désigner un homme ou une femme capable de nous emmener à l’Elysée en 2022 pour enfin redonner aux Français la fierté d’appartenir à un si beau pays. Maintenant, à nous de nous mettre au travail !
Propos recueillis par Amaury Bucco pour le Club de Valeurs actuelles.
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