« Je n’aime pas les riches, j’en conviens »
Cette « fameuse » et imbécile déclaration de François Hollande n’avait pas suffi à lui barrer la route de l’Elysée. Son calamiteux quinquennat a montré qu’il n’aimait pas non plus les classes moyennes.
En France, la gauche entretient depuis la révolution, un climat de détestation des riches et des patrons en laissant perdurer une lutte des classes larvée qui n’a plus de sens.
Sur ce sujet, voici la chronique d’Eric Brunet parue cette semaine dans Valeurs actuelles :
Bravo, Bernard Arnault
En France, le riche est le type qu’on déteste, les grands patrons ont toujours tort. Alors que leur réussite devrait susciter dans le pays des envies d’entreprendre.
Nous aurions tort de croire que le fameux « Je n’aime pas les riches, j’en conviens » prononcé par François Hollande en 2006 est derrière nous. Hollande est parti, mais la détestation des riches est toujours là. Certes, Macron a réussi l’exploit de mettre fin au tabou de l’ISF. Pourtant, à y regarder de plus près, le fond de sauce antiriche est toujours là. Désormais le fisc traque les « fortunes immobilières ». Comme le rappelle l’avocat fiscaliste Jean-Philippe Delsol, président de l’Institut de recherches économiques et fiscales (lref), « l’immobilier apparaît comme le bouc émissaire de la nouvelle politique. Il serait générateur de rentes indues à l’encontre desquelles le gouvernement serait légitime à utiliser le fléau de l’arme fiscale ». Finalement n’est-ce pas toujours la même logique qui se trouve à l’oeuvre ?
Dans le dernier classement Forbes des plus grandes fortunes mondiales, Bernard Arnault, patron de LVMH, se hisse au quatrième rang, derrière Jeff Bezos, Bill Gates et Warren Buffett. Sa fortune est passée, en un an, de 41,5 milliards de dollars à 72,2 milliards de dollars. Lorsqu’il se promène à New York, le tycoon tricolore signe des autographes comme une icône de rock. Mais en France, critiqué, dénigré, victime de fake news, Arnault préfère se taire. La mort dans l’âme, il laisse dire, convaincu que, chez nous, les grands patrons ont toujours tort.
En France, le riche, c’est un type qu’on aime détester.
« Revêtons nos préjugés, ils nous tiennent chaud », écrivait Maurice Barrès. Dans les années 1980, l’anthropologue René Girard expliquait que le bouc émissaire permettait de libérer « la part de violence qui irrigue les groupes humains ». Sous forme d’articles acrimonieux ou de reportages sensationnels, les passions les moins rationnelles deviennent légitimes, les fake news sortent du bois et les anathèmes pleuvent. On écrit partout qu’Arnault, fou de rage après un article du Monde, avait sanctionné le quotidien en lui retirant toutes les publicités LVMH. Cette info est fausse, comme tant d’autres, relayées par des films et des reportages. Car le populisme antiriche fait vendre. À tour de rôle, Carlos Ghosn, Martin Bouygues, Bernard Arnault, François Pinault en ont été les victimes.
Au gré des classements étalés dans les magazines, politiques et journalistes convertissent les revenus des riches en nombre de Smic ou de repas. On connaît la ritournelle démago : « Ça sert à quoi tout cet argent, on ne mange pas dix fois par jour ! » Depuis la parution du classement de Forbes, on répète que Bernard Arnault gagne 800 euros par seconde.
Absurde ! Ces évaluations correspondent à une projection boursière, par essence virtuelle. Ces caricatures sont dommageables car, sur le terrain de l’emploi, ces mêmes journalistes pourraient mettre en lumière le bon bilan de Bernard Arnault.
Comment se fait-il qu’il y ait encore un public pour ces théories racoleuses ?
Pourquoi les Français gobent-ils encore ces discours simplistes : « Il y a de l’argent en France, il suffit d’aller le prendre là où il se trouve. » L’idéologie marxiste et la lutte des classes ont la vie dure. Cette vindicte est absurde économiquement. Qui s’imagine encore que c’est l’enrichissement des Arnault, Bouygues et consorts qui plombe notre économie et empêche des créations d’emploi ? Dans une société raisonnable, la réussite des grands chefs d’entreprise devrait susciter une fierté patriotique. Hélas, cette attitude, en plus d’attiser les bas instincts (la convoitise, la jalousie … ), décourage l’esprit d’entreprise, insinuant que les réussites individuelles ne se construisent qu’au détriment des travailleurs. Cette vision du monde, digne des heures les plus sombres de la lutte des classes, est infantilisante et mièvre.
Partout, les grands patrons sont encensés. Partout, sauf en France, où l’on ignore encore qu’un pays pauvre est un pays qui a perdu ses riches.
Alors, merci, monsieur Arnault !
Eric Brunet pour Valeurs actuelles.
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