Le mot « fainéant » utilisé depuis Athènes par Emmanuel Macron pour qualifier les opposants à la réforme du code du travail risque de lui coûter cher !
La presse tourne en boucle sur cette sortie et ce n’est pas les explications laborieuses de l’entourage du président et de son porte-flingue Christophe Castaner, qui passe son temps à écrire l’Odyssée de son champion dans une noria incessante dans les médias, qui pourront réparer les dégâts d’une telle gaffe.
Car qui peut croire que Macron ne visait que les anciens présidents – il faut être gonflé pour traiter l’hyper-président Nicolas Sarkozy de fainéant – et aussi Mélenchon et Marine Le Pen (les extrêmes) ? Personne sauf les militants béats de la République en marche !
Mais je laisse la parole à Eric Zemmour qui s’est emparé du sujet dans sa chronique matinale sur RTL :
Yves Calvi : la tirade d’Emmanuel Macron, devant les journalistes à Athènes, dénonçant les fainéants qui s’opposaient à la réforme du travail, n’est pas passée inaperçue !
Eric Zemmour : Ah oui, ce fut le mot du jour, le mot mouliné toute la sainte journée par les chaines d’infos, le mot répété, psalmodié, commenté, trituré, analysé, décortiqué, le mot qui fera florès dans la manifestation d’aujourd’hui. Il y aura les fonctionnaires feignants*, les syndicalistes feignants, les étudiants feignants ! Les leaders de la CGT seront des feignants glorieux, Mélenchon et ses acolytes de la France insoumise seront feignants d’honneur !
Tous ceux qui voudront s’opposer à la politique gouvernementale s’affubleront désormais de l’adjectif maudit ou plutôt béni ! Macron ne pouvait pas leur faire un plus beau cadeau ! Insulter un adversaire l’anoblit. On se souvient du célèbre mot de Georges Marchais contre Daniel Cohn-Bendit, traité de gauchiste allemand, devenu dans les cortèges de mai 68 : « Nous sommes tous des juifs allemands ! »
Il y aura aujourd’hui une banderole : « Nous sommes tous des feignants ! » L’insulte sera d’autant plus retournée qu’elle n’est pas politique mais psychologique. Pas idéologique mais sociologique. Elle ne ressort pas du combat électoral mais de l’insulte, la vieille insulte de la bourgeoisie à l’égard des ouvriers, du patron à l’égard de ses employés :
« Tous des feignants ! »
Avec ce mot, Macron choisit son camp ! Le plus redoutable, en France, pays obsédé par l’égalité, le camp des dominants ! Alors qu’il a toujours voulu incarner la modernité, celle qui est censée dépasser les classes et même les nations, Macron ressort un vocabulaire qui date de 1936 et des congés payés ! Comme s’il avouait ainsi, ce que les cartes électorales de la présidentielle avait montré,
c’est à dire, qu’il est l’homme d’une bourgeoisie flamboyante,
celle des vainqueurs de la mondialisation !
Yves Calvi : Comment expliquez-vous pareil impair ?
Eric Zemmour : ça n’est pas le première fois que Macron commet ce genre d’impair. On se souvient des illettrés de l’usine Gad ou des kwassi-kwassa comoriens. Et ce n’est pas non plus le premier président à se fourvoyer ainsi comme Nicolas Sarkozy traitant les magistrats de petits pois ! Mais à l’époque, l’ancien président avait une excuse : ses communicants, inspirés des « spin doctors » de Bill Clinton, avaient décrété qu’il fallait un mot par jour, une transgression par jour. Sarkozy avait décidé de prendre la machine médiatique par les cornes, de l’alimenter délibérément et quotidiennement. Et ainsi, croyait-il, de choisir les thèmes et de s’imposer à elle. sa stratégie fut reprise par son successeur, François Hollande, roi des petites phrases, en continu …
Mais Emmanuel Macron avait choisi de renoncer à cette stratégie, de rétablir la parole rare, selon la vieille méthode du communicant de François Mitterrand et de Jacques Chirac, Jacques Pilhan. Parole rare et donc attendue ! Parole jupitérienne, disait-il ! Emmanuel Macron, c’est un peu docteur Jekyll et mister Hyde, Emmanuel qui parle à tort et à travers et Macron qui théorise le silence monarchiste.
Et bien Emmanuel devra un peu plus obéir à Macron !
Eric Zemmour pour RTL.
* Nota : je remarque qu’Eric Zemmour utilise le mot « feignant » alors qu’Emmanuel Macron avait employé le mot « fainéant » … Cela m’a permis d’apprendre que ces deux mots, utilisés l’un pour l’autre dans le langage courant, n’avaient en fait pas le même sens :
- Un fainéant est celui qui ne fait clairement rien,
- Un feignant (du verbe feindre) fait semblant de travailler !
En terme d’anciens présidents, je classerais Jacques Chirac dans la case fainéant, notamment lors de son second mandat alors que la rubrique feignant me parait parfaitement convenir à François Hollande dont les louvoiements inter-courant paralysaient toute action en profondeur.
Lire en complément sur AgoraVox : « L’invective et le mépris« .
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