Le « Fait du Prince » ne peut entrer à Notre-Dame !

Publié par le 27 Déc, 2024 dans Blog | 0 commentaire

Le « Fait du Prince » ne peut entrer à Notre-Dame !

Mais au fait, c’est quoi, le fait du Prince ?

Le fait du prince est nommé ainsi car il était, sous l’Ancien Régime, la prérogative du souverain. Son statut divin lui permettait, dans le cas où aucune loi ne prévoyait de restriction à son pouvoir, d’émettre des choix arbitraires.

On utilise parfois ce terme pour désigner la manipulation du cours de la monnaie par les rois de France.

Plusieurs prérogatives des rois de France sont restées en vigueur sous les régimes politiques français suivants. Les républiques françaises, dont la Cinquième République, les ont parfois conservés tels quels. Le droit de grâce présidentiel en fait partie, car il représente une entorse au cours normal de la justice.

Sur Europe 1, Eugénie Bastié s’est insurgée contre un « fait du prince » typique, la volonté de Macron d’imposer des vitraux contemporains dans certaines chapelles de Notre-Dame :

Eugénie Bastié : Macron croit encore pouvoir se référer à ce droit pour imposer, pour les siècles à venir, sa marque dans la reconstruction partielle de la cathédrale Notre-Dame de Paris !

Eugénie Bastié

C’est une polémique qui dure depuis des mois. Emmanuel Macron et l’archevêché de Paris ont décidé de remplacer à Notre-Dame des grisailles de Viollet-le-Duc par des vitraux contemporains figuratifs. Un appel à projet a été lancé il y a un an, et c’est l’artiste Claire Tabouret qui vient d’être désignée.

C’est une star de la peinture contemporaine, fortement cotée, qui vit à Los Angeles, qui est connue notamment pour ses peintures de migrants, et n’affiche pas de sensibilité religieuse particulière. Mais peu importe l’artiste, ce remplacement des vitraux suscite une opposition farouche des défenseurs du patrimoine, mais aussi de simples citoyens, puisqu’une pétition a rassemblé plus de 240 000 signatures contre ce projet. Les opposants ont des arguments plutôt précis.

  1. Ces vitraux de Viollet-le-Duc n’ont pas été touchés par l’incendie, mais ils ont été quand même restaurés par l’argent des donateurs. Ils sont donc en bon état, et il n’y a aucune raison pratique de les remplacer.
  2. La Charte de Venise interdit de remplacer des œuvres existence, classées monuments historiques.
  3. Les vitraux de Notre-Dame conçus par Viollet-le-Duc l’ont été comme un ensemble cohérent. Il s’agit d’une véritable création que l’architecte a voulu fidèle à l’origine gothique de la cathédrale.

Alors face à toutes ces bonnes raisons, pourquoi ce choix de vouloir absolument des vitraux contemporains ? La Commission nationale du patrimoine et de l’architecture a rejeté à l’unanimité ce projet le 11 juillet dernier.

Mais le président de la République et l’archevêché sont passés outre cette décision.

Ils ont décidé de poursuivre coûte que coûte cette idée d’innovation. Alors pourquoi ? Eh bien parce qu’il faut à tout prix laisser une marque du présent dans Notre-Dame.

Parce qu’on ne peut pas considérer que ce chef-d’œuvre se suffise à lui-même. Il faut une innovation pour montrer que notre époque est géniale, est encore dynamique. Rappelez-vous, le lendemain même de l’incendie, alors que les braises de Notre-Dame étaient encore chaudes, Emmanuel Macron appelait de ses vœux un geste architectural contemporain pour reconstruire la flèche.

Certains proposèrent une flèche avec des spots lumineux, d’autres une charpente entièrement recouverte de vitraux, d’autres encore une immense verrière. Finalement Emmanuel Macron n’a pas pu mener à bien ce projet pour des raisons essentiellement de calendrier et d’opinion. Oui, l’opinion était contre, et il s’est rabattu donc sur les vitraux. Peu importe d’ailleurs la beauté ou pas des vitraux contemporains, quoiqu’on puisse sérieusement en douter vu ce que produit l’art d’aujourd’hui.

Le problème, c’est que ce projet est un caprice.

C’est un geste d’orgueil, dicté par l’idéologie progressiste, plus qu’une nécessité patrimoniale.

Relance de Dimitri Pavlenco : Mais pourtant, Viollet-le-Duc lui-même n’a-t-il pas restauré Notre-Dame à sa façon, celle de son époque ?

Eugénie Bastié : Écoutez, c’est ce que voudraient faire croire les partisans acharnés du modernisme.

Viollet-le-Duc aurait été lui aussi un progressiste, un innovateur, il aurait modelé Notre-Dame selon ses vœux. Eh bien, rien n’est plus faux. Viollet-le-Duc, qui appartenait pourtant à un siècle où l’on croyait encore plus au progrès qu’aujourd’hui, était fidèle à la tradition et ne cherchait en rien à innover.

Voilà ce qu’il disait sur Notre-Dame :

Restaurer Notre-Dame, ce n’est pas faire de l’art, mais seulement se soumettre à l’art d’une époque qui n’est plus. Loin de nous l’idée de compléter une œuvre aussi remarquablement belle, c’est là une prétention à laquelle nous avons ne rien comprendre.

Sa leçon de modestie a malheureusement été oubliée.

Eugénie Bastié pour Europe 1.

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